Le stratège Sun Tzu disait dans L’art de la Guerre, "Connais ton ennemi et connais-toi toi-même ; eussiez-vous cent guerres à soutenir, cent fois vous serez victorieux". Dans la guerre contre le terrorisme qui nous oppose à l’Etat Islamique, il est intéressant de savoir ce que Daesh publie dans son magazine de propagande intitulé Dabiq pour mieux cerner notre ennemi qui nous menace. C’est ce qu’a fait le site américain Cracked. Vous allez voir que cette organisation manie à merveille la communication dans ce magazine en couleur qui propose articles et photos en double page. Le dernier numéro qui vient de paraître était d’ailleurs consacré aux attentats qui ont touché la France le vendredi 13 novembre dernier.
Des publications officielles assez brillantes
C’est assez surprenant de se dire qu’un groupe terroriste publie régulièrement un magazine ! En effet, Dabiq est composé de 60 à 80 pages, le tout en couleur et avec une charte graphique. Il est diffusé sur Internet depuis juillet 2014. Chaque numéro propose des versets du Coran, mais aussi des double-pages qui mettent en avant des membres du groupe terroriste, un peu dans le style presse people ! Le magazine porte ce nom en référence à la ville de Dabiq située au Nord-Est de la Syrie qui, d’après un haddith sur l’apocalypse est l’endroit où les armées de l’islam devront affronter les forces infidèles.
En général, les articles débutent par "Tout cela est arrivé par la volonté de Dieu" ou encore "Louer Allah pour nous accorder la victoire". Régulièrement, un journaliste britannique, John Cantlie, prisonnier de l’Etat Islamique depuis 2012, publie un édito dans les colonnes de ce magazine. Il y critique la politique étrangère de son pays et celle des Etats-Unis ou fait l’éloge de l’intelligence de la direction de l’EI.
Il existe même une rubrique dans laquelle l’EI diffuse les propos de leurs ennemis de l’occident. Elle est intitulée "In the words of the ennemies" ("Les paroles des ennemis") ou dernièrement, on a pu constater que le magazine consacrait un "TOP 10" des vidéos des attaques les plus meurtrières à travers le monde.
Et comme tout bon magazine qui se respecte, il y a de la pub. Ici, une page pour faire la promotion de l’armée de l’Etat Islamique qui appelle les lecteurs à venir rejoindre les rangs… Une pub assez idyllique sauf qu’en y regardant bien, pour attirer les gens à venir renforcer leurs troupes, ils utilisent une photo d’un type mort (regardez bien ci-dessous la 3eme petite photo en bas à gauche)…
Les corps sans vie des combattants à l’honneur
Au fil des pages, on peut découvrir que l’Etat Islamique met à l’honneur ses combattants. Mais, contrairement aux journaux occidentaux, Dabiq ne floute pas les visages des morts qui se sont battus dans les rangs de Daesh. L’EI publie aussi des photos à la suite des bombardements où l’on peut voir des enfants morts ou des bébés avec la tête complètement ouverte après avoir reçu une balle pour montrer l’agression du régime de Bachar el-Assad. Par contre, les rafidis, c’est-à-dire les déserteurs, n’ont pas le droit à cet "honneur" : leurs cadavres sont recouverts d’une bâche.
Les réseaux sociaux pour recruter
Daesh use des réseaux sociaux pour recruter des combattants et inciter des jeunes à venir les rejoindre dans leur armée. Twitter est un outil indispensable pour diffuser leurs messages de propagande et leurs vidéos. Pour les messages vidéo morbides, ils mettent le paquet pour donner envie aux jeunes de s’engager. D’ailleurs ils n’hésitent pas à donner des instructions pour pouvoir les lire sur VLC. Ils proposent aussi des sous-titres pour permettre de diffuser les vidéos de propagande dans différents pays.
D’après les chiffres, il semblerait que ces campagnes de recrutement multilingues aurait permis à Daesh de gagner 25.000 combattants étrangers.
Ce que veut l’EI : des représailles violentes
Chaque édition de Dabiq débute par cette citation :
"L'étincelle a été allumée ici en Iraq, et sa chaleur continuera à s'intensifier –par la permission d'Allah– jusqu'à ce qu'elle brûle les armées croisées à Dabiq."
L’Etat Islamique considère qu’une invasion américaine est inévitable. Pour les fanatiques, cela représenterait l’accomplissement de la prophétie. D’ailleurs, si l’on en croit la propagande menée par Daesh, le fait d’être tué par une roquette serait même une bonne chose. Tous ceux qui rejoignent les rangs de l’EI sont prêts à mourir.
Les ennemis de Daesh ne sont pas forcément ceux auxquels on pense…
En parcourant les pages du magazine officiel de l’Etat Islamique on peut être surpris de voir que Daesh déteste Al-Qaida et les attentats du 11 septembre. Il existe une haine entre Al-Qaida et l’EI. D’ailleurs, pour Ayman Al Zaouahiri, qui a repris la tête de l’organisation à la mort de Ben Laden, Abou Bakr Al Baghdadi n’est pas légitime pour être le chef d’un état de voleurs, selon ses dires, et demande par ailleurs aux musulmans de ne pas faire allégeance à leur "émir" qui n’applique pas les principes du prophète. David Petraeus, un général américain a même proposé aux Etats-Unis d’utiliser des combattants d’Al-Qaida pour combattre Daesh.
Ici, on peut voir que l’EI déteste l’Iran et considère les hérétiques du régime iranien comme ses ennemis tout comme les Etats-Unis et la Russie. D’ailleurs, Daesh n’hésite pas affirmer que le président iranien n’est qu’une marionnette manipulée par Israël.
Mais l’EI ne concentre pas uniquement sa haine sur les Etats-Unis ou la France. Les premières victimes de l’organisation djihadiste sont des musulmans. Début 2014, selon un rapport de l’ONU, l’EI avait fait plus de 9000 morts en Irak dont la majorité était de confession musulmane. Les premiers visés sont les chiites. Après la chute de Saddam Hussein, les sunnites ont été mis de côté et se vengent donc. Mais les sunnites ne sont pas épargnés s’ils refusent de faire allégeance au Califat. Entre 2014 et août 2015, 930 membres d’une tribu syrienne auraient été tués par Daesh.
Les difficultés de l’EI
Même si cela reste de la propagande, l’EI semble avoir des difficultés financières. La moitié de leurs revenus l’an dernier aurait été volée dans des banques en Irak. Et l’organisation consacre la moitié de son chiffre d’affaires pour payer son armée. De plus, l’EI, qui a instauré un impôt sur les habitants de son territoire, voit cette source de revenu s’effondrer car les contribuables tentent de fuir.
Un autre problème majeur auquel est confronté l’EI c’est qu’il peine à recruter des spécialistes qualifiés comme des médecins, des mécaniciens… Pour attirer des professionnels de la santé, Daesh n’a pas hésité à faire la promotion de leurs structures dans la revue officielle.
En résumé, Dabiq s’inspire des grands magazines occidentaux en leur empruntant les codes de la presse, comme support de propagande dans le but de recruter des nouvelles personnes à travers le monde. La communication de l’EI est très maîtrisée. Daesh publie également des magazines dans d’autres langues comme en Allemand ou en Français avec notamment une revue disponible dans notre langue depuis décembre 2014. Enfin, l’autre but de cette revue, selon Richard Barrett, ex-responsable britannique de la lutte antiterroriste, est également un moyen pour Daesh de présenter le "califat" comme étant une entité réelle et surtout crédible.
Par jeanLucasec, il y a 8 ans :
Super intéressant comme point de vu. Merci !
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