Sept créatures fantastiques des bestiaires médiévaux
Je pense ne pas trop m'avancer en affirmant que tout le monde ici à déjà entendu parler de basilics, golems, phoenix, et autres manticores (au moins l'un d'entre eux... Au moins un ?), qui sont fréquemment représentés, de façon plus ou moins fidèle (surtout moins) dans notre pop culture.
je suis presque certaine qu'une grande part d'entre vous ignore à quoi ressemblaient tous ces mythes à la base, lorsqu'ils passaient de bouche à oreille
Amphisbène
Ce mot devrait rappeler quelque chose aux fans du Point Culture, mais avant d'être un squamate, l'amphisbène est une créature mi-serpent mi-oiseau, avec une tête aux deux extrémités de son corps (en effet, son nom vient du grec amphisbaina qui veut dire "qui marche des deux bouts" ). Il est souvent plus ou moins confondu avec le basilic (voir plus bas dans l'article). Bien qu'il soit incapable de voler, il peut se déplacer très rapidement et hypnotiser ses victimes.
C'est un peu le petit frère du basilic avec moins de pouvoirs et plus schizophrène. Le premier qui me dit que schizophrène n'est pas le terme exact et qu'il faut dire "trouble de la personnalité multiple", je lui fais remarquer que "avec moins de pouvoirs et plus de troubles de la personnalité multiple" ça sonne moins bien et que tout le monde a compris.
Aspic
Aujourd'hui, si je vous dis aspic, vous pensez normalement à une vipère très réelle et absolument pas fantastique (voir à un plat froid composé de légumes, viande, œuf et gélatine ou même à un brevet de sorcellerie pour les plus littéraires d'entre vous). Donc rien de bien folichon (ce mot est particulièrement intéressant) à priori.
Seulement, au Moyen Âge, ils voyaient les choses autrement, et quoi de mieux pour vous expliquer leur point de vue que de citer Guillaume Le Clerc, auteur du Bestiaire Divin (1210 PCN):
"Ce serpent dont je vous parle (je ne l'ai jamais vu, cependant, mais c'est là vérité prouvée), lorsqu'il craint d'être victime des sortilèges de l'enchanteur, qu'il redoute, presse l'une de ses oreilles très fortement contre le sol, et, à l'aide de sa queue, il se bouche parfaitement l'autre oreille, de telle sorte qu'elle ne puisse entendre l'enchanteur en aucune façon. Telle est la prudence de ce serpent."
Vous voyez l'idée. Selon les divers témoignages d'époque, l'aspic aurait deux, quatre ou aucune patte et une pierre rouge (ou escarboucle pour utiliser la terminologie exacte) sur le front.
Il existe plusieurs espèces d'aspics:
- La dispade est la plus traîtresse : elle est d'une très grande perfidie, et, aussitôt qu'elle a mordu l'homme, celui-ci meurt rapidement, tourmenté par la soif.
- La prialis tue les gens en les endormant. C'est l'une d'elle qui mordit la reine Cléopâtre.
- L'haemorrhoïs fait répandre le sang de sa victime jusqu'à ce qu'elle meure.
- La praester avance toujours la gueule ouverte, et quand elle serre quelqu'un de ses dents, sa victime enfle à tel point qu'elle en meurt et pourrit aussitôt.
Basilic
Fans d'Harry Potter s'abstenir, le basilic médiéval n'a pas grand-chose à voir avec celui de notre sorcier préféré. Une des premières mentions de ce monstre a été faite par Pline l'Ancien, auteur romain dont le seul ouvrage qui nous est parvenu est sa Naturalis Historia en 37 volumes. Pourquoi en parler ? D'abord parce que cet ouvrage s'est payé le luxe d'être une référence en à peu près tout pendant plus d'un millénaire et ensuite parce qu'énormément de créatures fantastiques de l'antiquité ont été perpétuées grâce à lui, donc rien que pour le basilic il mérite tout notre respect. Parenthèse refermée, revenons à nos serpents.
Selon Pline donc, le basilic était un petit serpent avec une couronne et un paquet de pouvoirs, comme tuer par l'odeur, le regard, faire brûler la végétation toujours par son regard, etc. Son sang avait de grandes propriétés magiques. Jusque-là pas trop éloigné d'Harry Potter donc.
C'est encore au Moyen Âge que les choses se compliquent et deviennent par la même occasion amusantes. Je vais essayer de faire un résumé de ce qu'était un basilic pour nos amis chevaliers, mais gardons à l'esprit que c'est une époque où les habitants de la ville d'à côté parlaient une langue différente... Et comme j'aime les citations, laissons Paul Sébillot, auteur du XVIe siècle, nous expliquer la naissance du basilic :
"Quelques-uns forgent l'origine et naissance du basilic en ceste sorte, à sçavoir que quand un coq commence à devenir fort vieil, ce qui arrive au septieme ou neuvieme ou au plus tard au quatorzieme de son âge, il pond un oeuf aux plus chauds mois de l'esté, qui s'est formé de l'excrement pourri de sa semence ou d'un ord et bourreux amas d'humeurs, et de cet oeuf plusieurs pensent que le basilic naist". (Croyances, mythes et légendes des pays de France - La Faune)
L'apparence du basilic est généralement celle d'un serpent avec les ailes, les pattes, les ergots et parfois la tête d'un coq, voir une tête de reptile d'un côté et une tête de coq de l'autre. Petite mention spéciale pour Jean-François Bladé (1827 - 1900) qui le décrit ainsi : "Le basilic a le corps d'une loutre, avec une tête d'homme couronnée d'or, comme les empereurs et les rois."
Au niveau des pouvoirs, tout le monde connaît son regard, qui tue ou pétrifie, mais son souffle empoisonné qui tue les plantes est moins connu.
Seule une belette peut tuer un basilic, car les belettes sont des êtres supérieurs, mais nous pauvres humains sans poil devons le forcer à se regarder dans un miroir pour qu'il soit tué par son propre reflet. Il faut aussi savoir que les basilics ont peur des coqs, ce qui est normal parce que personne n'aime voir son père en colère, et que l'application de feuilles de rue soigne les blessures infligées par le venin de la bête.
Eale
L'éale est un monstre amphibie qui a la taille d'un cheval, une mâchoire de sanglier et une queue d'éléphant, armé de défenses et de cornes mobiles. C'est l'ennemi juré du basilic. Il est si redoutable que ce dernier ne l'attaque que durant son sommeil. Il a d'abord été mentionné par ce très cher Pline l'Ancien, et a été par après tellement déformé dans les différentes versions médiévales que je vais me contenter de cette courte description, qui regroupe ses caractéristiques les plus courantes.
Griffon
Le griffon c'est un peu la Mary-Sue des animaux fantastiques : il est beau, fort, brave, représente la justice et la noblesse, sérieusement, même la licorne embrochait des gens de temps à autre... Physiquement, le griffon a un corps de félin, mais sa tête, son cou et ses ailes sont de rapace, et le reste de son corps est généralement recouvert de plumes magnifiquement colorées. Les nobles aimaient bien le mettre sur leur blason, parce que c'est classe et qu'une licorne ça fait plus gay.
Manticore
Celui-là a un statut tout particulier pour moi, tout simplement parce que grâce à un livre aux illustrations particulièrement imaginatives, CETTE SALOPERIE A DETRUIT MON ENFANCE (j'ai cherché l'illustration en question sur internet mais ne l'ai pas trouvée, dommage, j'aurais aimé vous en faire profiter). Hum hum bref, recentrons-nous, que je puisse vous expliquer pourquoi ce truc est ignoble.
La manticore a un corps de fauve, une queue avec un aiguillon d'une cinquantaine de centimètres et un visage humain, si on omet la bouche allant d'une oreille à l'autre et remplie de trois rangées de dents à faire pâlir de jalousie le requin des Dents de la Mer. Un physique idéal.
Comme l'indique son nom (manticore vient de de mardikhouran, mangeur d'hommes en ancien persan), son régime de prédilection est la chair humaine, avec cette particularité qu'il n'est pas difficile sur les condiments puisqu'il ne laisse rien, ni os ni vêtements. Et ce truc se trouvait dans un livre pour enfant. Sérieusement !
Phoenix
Alors pour commencer, le phoenix tel qu'on le connaît regroupe plusieurs oiseaux de différentes mythologies orientales, dont principalement la mythologie persane et égyptienne. Déjà, les créatures dont la mythologie d'origine est relativement clairement définie comme le basilic ou la manticore sont au final de beaux bazars sans queue ni tête, alors un animal imaginaire qui est un patchwork de plusieurs animaux imaginaires qui se ressemblent fort mais dont on n'arrive pas à situer qui a copié sur qui, je vous laisse imaginer.
Généralement, il n'existe qu'un seul phoenix immortel qui se régénère infiniment par combustion spontanée. Comme dans Harry Potter, oui. S'il est parfois mentionné qu'il a d'autres pouvoirs, il n'y a pas de grosses redondances.
Physiquement... C'est un oiseau. C'est à peu près tout ce qui revient. Bon, je suis mauvaise langue, il est souvent décrit comme une sorte de héron, ce qui renvoie directement à son parent de la mythologie égyptienne, l'oiseau Bénou, une sorte d'aigle rouge, mais ça reste vague.
Voilà, j'espère que vous avez aimé ces quelques brèves présentations, si vous connaissez des informations supplémentaires que vous avez envie de partager sur ces créatures, je vous invite à les mettre en commentaires avec si possible vos sources. Pour ma part je me suis principalement inspirée de ces deux ouvrages que je vous conseille vivement :
- BRASEY Edouart, Grande Encyclopédie du Merveilleux, éditions Le Pré aux Clercs, 2012
- BOTTET Béatrice, Encyclopédie du Fantastique et de l'Etrange l'Intégrale, Edition Casterman, 2008, Paris.
Et si vous voulez voir d'autres articles du même type, c'est à dire sur des créatures bizarres, des phénomènes paranormaux, des théories du complot ou toute autre chose étrange, et bien dites le dans les commentaires, je me ferais un plaisir de travailler dessus.
Personnellement je possède plusieurs encyclopédies du Merveilleux et j'ai eu la chance de voir une exposition à Oxford présentant plusieurs livres originaux du Moyen-Age avec des enluminures et des textes décrivant une dizaine d'animaux fantastiques ; c'est intéressant de voir ce que chaque mythologie apporte à la façon dont on voit ces animaux !
mais bon moi mes références viennent du jeu de rôle donc ...
En plus dans la plupart des oeuvres modernes, mon image est plus proche de l'apparence de la cocatrix que du basilique, en effet ... En fait ça pourrait être une cocatrix à la base, j'avoue ne pas m'être cassée la tête pour la choisir et juste en avoir pris une qui avait un air "ancien"...
"Phoenix", c'est le mot ANGLAIS !! Le mot français est "PHÉNIX". Voilaaaaa mon âme de littéraire est apaisée je m'en vais bisous :D
Après tu l'a peut être vue autre part mais si tu trouve tu pourras toujours mettre à jour ton article ^^
Bonne soirée :)
Mais ça reste intéressant et tu peux en faire d'autre.
J'avais moi aussi un livre quand j'etais petite qui recensait plusieurs betes avec un poeme en description. Je me souvient notament de la bete du gevaudan et des flammandes. J'aurai aimé remettre la main dessus parce que j'avais adoré ! (Oui, non seulement mes parents m'offraient un livre pareil, mais en plus je le lisait en boucle...)
Si ca se trouve on parle du même livre?
http://google.fr/url/…
Le début de l'article m'avait donné pas mal d'espoir >.<
Légère description du phoenix.