Pokémon : stocks, scalpers, prix, rien ne va avec l'édition évolutions Prismatiques

Quatre ans après le regain de fascination pour les cartes Pokémon, la tendance est en train de s'inverser au sein de la florissante communauté autour des petits monstres. La nouvelle extension Évolutions Prismatiques attendue à la mi-janvier et très recherchée pour les évolutions d'Evoli créé le bad buzz. Souci de stocks, taux de drop catastrophique, prix à la revente indécent, l'édition fait tache dans le paysage pourtant sain des cartes Pokémon. La faute aux scalpers, mais avant tout à la stratégie de The Pokémon Company, qui questionne sur ses objectifs à long terme avec sa licence.

L'édition Évolutions Prismatiques crée le bad buzz 

En 2021, souvenirs d'enfance et attraits pour la collection se combinaient pour créer une véritable hype autour des cartes Pokémon. Devant l'énorme demande (parfaitement alimentée par YouTube ou TikTok), d'enfants comme d'anciens de la génération Z, de collectionneurs comme de joueurs affirmés, The Pokémon Company a tenté de suivre le rythme en lançant des sets aux cartes toujours plus rares. En 2023 par exemple, l'entreprise a sorti l’extension 151 – avec à l’honneur les créatures de la première génération. À l'automne dernier, c'était au tour du set Étincelles Deferlantes – la 8ème extension majeure du bloc Écarlate et Violet – de créer l'engouement grâce à ses nouvelles éditions de Pikachu, Latias ou Latios.

Alors que le TCG Pokémon (pour trading card game - littéralement, jeu de cartes à collectionner) attire un public toujours plus large et diversifié, tous les yeux sont désormais rivés sur la prochaine édition, qui doit faire date dans l'histoire du jeu de cartes débuté en 1996 au Japon. Répondant au doux nom d'Évolutions Prismatiques, aussi appelé 8.5 chez les collectionneurs, la nouvelle série attendue le 17 janvier prochain promet un focus sur Evoli et ses nombreuses évolutions, et de craquer des cartes parmi les plus chères du marché, comme un Noctali qui atteint déjà des chiffres impressionnants.

Seulement voilà, la hype est rapidement redescendue. Sur les réseaux, groupes Facebook, subreddit et autres, les joueurs s'écharpent, s'attaquent, au point de créer une ambiance malsaine, qui semble gangréner toute une communauté pourtant réputée saine. Derrière ce basculement, la responsabilité de la Pokémon Company, qui paraît ne plus maîtriser son sujet, et davantage d'opérer une stratégie toxique, dont les premières victimes sont les joueurs. Que s'est-il passé avec l'extension 8.5 ?

Stocks, scalpers, prix exorbitants, faible drop, rien ne va sur l'édition 8.5

Son déploiement d'abord. Les boosters comme les displays ne sont pas disponibles à la vente, comme pour les autres éditions, mais sont regroupés via des coffrets déployés au compte-goutte, comme le Coffret Elite Trainer Box (9 boosters, dés, pièce, carte promotionnelle et énergies), ou le Coffret Poster (3 boosters, trois cartes promo, un poster exclusif). Un choix stratégique qui prive d'emblée de nombreux joueurs d'acquérir leur petit sésame à la sortie. Car bien entendu, les précommandes de ces produits sur les sites spécialisés sont d’ores et déjà complètes. Idem dans les boutiques spécialisées et magasins de jouets, qui ont - en plus - beaucoup moins de stocks que chez les sites revendeurs. Ne parlons pas du scalping, qui enfonce le clou, qui crée l'inflation. Dès lors, le peu de stocks qui restent à la portée des acheteurs affichent des prix tout bonnement astronomiques. Exemple avec ce coffret classeur initialement vendu autour de 55 euros, qui voit son prix grimper entre 140 à 160 euros sur Ebay ou Vinted.

S'ajoute à cela un autre problème. Début janvier, les magasins King Jouet ont sorti dans leurs rayons plusieurs items de l'extension en avance, permettant ainsi à certains - comme des influenceurs et youtubeurs - de les tester en avant-première. Mais là encore, c'est la douche froide. Sur les 300 à 400 boosters ouverts estimés, aucun hit (entendre : carte alternative très rare) n'est malheureusement tombé. Sur des chaînes comme Ilan du Bourg-Palette, qui n'a rien trouvé dans son tripack, si ce ne sont deux petits hits en 18 boosters, ou encore chez David Lafarge, qui crie au scandale (à l'écriture de ses lignes, il a depuis tiré un Pikachu alternatif gold), tous, ou presque, parlent d'un taux de drop catastrophique. C'est la désillusion. Difficile donc de compléter sa collection dans ces conditions. Les rares alternatives prisées de tous contenues dans quelques boosters risquent fort de coûter des prix astronomiques - et c'est même déjà le cas. Qui acceptera alors de débourser des sommes folles pour espérer gonfler son Pokédex. Et qui en a les moyens ? Certainement pas les enfants, pour qui la licence est destinée à l'origine, et dont les parents peineront à expliquer la réalité du marché.

La colère gronde sur les réseaux, quel futur envisage Pokémon Company ?

Parlons aussi du sentiment de frustration. Celui de n'ouvrir aucune jolie carte espérée d'un coffret acheté au prix fort. Une situation que Pokémon ne maîtrise plus et qui enflamme la communauté. Les esprits se déchaînent sur les réseaux, tout comme sur les applications d’enchères Voggt et Whatnot. "En 4 ans, on a jamais vu une série avec autant de problèmes (...) skippez la série les gars", avoue Kiibiki, personnalité phare de la communauté Pokémon. C'est dire l'ampleur du désastre. 

Bref, la situation semble dramatique à en croire les dires de la communauté. Malheureusement, tant qu'il y aura des acheteurs prêts à mettre le prix pour se procurer un booster aux scalpers, la situation ne s'arrangera pas. Mais si ces derniers ont leur part de responsabilité, c'est bien Pokémon Company qui est le grand artisan de cette dégringolade. Finalement, ce sont bien les collectionneurs et les enfants - la principale cible de Pokémon - qui paieront les pots cassés. On rappelle qu'au départ, le jeu a été créé dans un but de partage et d'échange. L'engouement autour des petites créatures semble s'étioler. En voulant trop tirer sur la corde, le géant Japonais cannibalise à l'inverse toute une communauté devenue de moins en moins solidaire. De quoi se questionner sur l'objectif à plus ou moins long terme de Pokémon avec sa poule aux œufs d'or. Ses velléités, que certains qualifient de mercantiles, risquent à terme de tuer l'interêt.

Alors bien sûr, tout n'est pas perdu. Certains youtubeurs proposent de faire gagner quelques coffrets sur leurs chaînes (en concours ou en cadeaux). Autre moyen d'éviter l'écœurement, se diriger vers les versions japonaises, dont le taux de drop est beaucoup plus acceptable. Enfin, ne pas céder aux sirènes des scalpers et attendre que le marché se régule est peut-être la solution la plus envisageable, malgré l'envie presque insoutenable pour beaucoup, de craquer l'aluminium et faire glisser la dernière carte.