Ces 15 bandes-dessinées franco-belges sont des chefs-d'oeuvre

Chez Hitek, nous parlons régulièrement de comics et de mangas. Mais n'oublions pas qu'Angoulême est la capitale internationale de la Bande-Dessinée. Rendons hommage aujourd'hui au patrimoine bédéistique français et belge avec ces quinze bandes-dessinées cultes. 

Attention : Nous avons choisi de vous proposer une sélection de quinze bandes-dessinées ; cela implique malheureusement que nous avons dû faire des choix. Parce que nous voulions à la fois montrer la diversité de la bande-dessinée franco-belge, mais également son évolution à travers les décennies, nous avons volontairement mis de côté certains classiques. Par ailleurs, l'absence de Corto Maltese de Hugo Pratt s'explique très simplement : c'est une BD italienne. 

#1 Les Aventures de Tintin, de Hergé (1929)

Publiée pour la première fois en 1929 dans les pages du Petit Vingtième, Les Aventures de Tintin du belge Hergé est sans doute - avec Astérix de Goscinny et Uderzo - la série de BD franco-belge la plus connue au monde. En dépit des préjugés colonialistes des premiers albums de la série, Les Aventures de Tintin n'en demeure pas moins un modèle du récit d'aventures, au point d'inspirer le cinéma, de L'Homme de Rio de Philippe de Broca avec Jean-Paul Belmondo aux Aventures de Tintin : le Secret de la Licorne de Steven Spielberg - sans oublier la saga Indiana Jones de tonton Spielberg. Mais Les Aventures de Tintin, c'est également un formidable témoignage des grands événements du siècle dernier (comme la Guerre de l'Opium et la Mandchourie dans Tintin et le Lotus Bleu), ainsi qu'une série d'une extraordinaire variété, certains albums n'hésitant pas à lorgner vers le fantastique (Les Sept Boules de Cristal) et la SF (Objectif Lune et On a marché sur la Lune). 

#2 Lucky Luke, de Morris et Goscinny (1946-...)

D'abord créée par le dessinateur Morris, qui est rejoint à partir du neuvième album par le scénariste Goscinny, Lucky Luke est sans aucun doute l'une des bandes-dessinées les plus célèbres de France et de Belgique. Parue dans un supplément de Spirou à partir de 1946, Lucky Luke est l'un des plus grands hommages aux westerns, que la bande-dessinée parodie avec beaucoup d'efficacité. La collaboration entre ces deux grands artistes va permettre la création de personnages secondaires aujourd'hui emblématiques : les frères Dalton (cousins des premiers Dalton que Morris a fait pendre dans un album) ou encore Rantanplan, le chien le plus bête du monde. On vous recommande aussi les premiers albums scénarisés par Morris en personne, plus sombre et peut-être plus palpitants.

#3 Blake et Mortimer, d'Edgar P. Jacobs (1947-...)

Ancien chanteur lyrique contraint d'abandonner sa carrière pendant l'occupation de la Belgique par l'Allemagne, Edgar P. Jacobs est aujourd'hui principalement connu pour son chef-d'oeuvre, Blake et Mortimer. Comptant avec Hergé comme les deux grands génies de la "ligne claire", il a offert à la postérité un classique de la bande-dessinée franco-belge : Blake et Mortimer. Racontant les aventures de Francis Blake, directeur du MI5, et de Philip Mortimer, scientifique spécialisé en physique nucléaire, la série mêle policier et Science-Fiction. S'il ne fallait découvrir qu'un seul album de Blake et Mortimer, ce serait La Marque Jaune, chef-d'oeuvre absolu du genre !

#4 Les aventures de Spirou et Fantasio, d'André Franquin (1950-...)

Autre grand génie indémodable de la bande-dessinée franco-belge, Franquin est sans doute l'auteur qui a le plus marqué les lecteurs de Spirou. Qu'il officie en tant que dessinateur et scénariste (La Mauvaise Tête) ou qu'il se contente de dessiner pour des amis (QRN sur Bretzelburg), Franquin nous surprend autant par son sens inouï du gag que par la splendeur de ses dessins. Il est celui qui a le plus apporté à l'univers de Spirou, du Comte de Champignac à Zorglub, en passant par le Masupilami et le Maire de Champignac. Certains de ses albums de Spirou, comme Le Dictateur et le Champignon ou Z comme Zorglub, sont des sommets de la bande-dessinée franco-belge, véritables références pour des générations d'auteurs de bandes-dessinées. 

#5 Astérix, de René Goscinny et Albert Uderzo (1959-...)

Référence ultime de la bande-dessinée humoristique française, Astérix est bien plus que "la-bande-dessinée-à-papa" dans laquelle trop de personnes veulent la ranger. Accompagné du dessinateur prodige Albert Uderzo, René Goscinny dresse le portrait désopilant des français, nous dépeignant comme des gaulois à la fois râleurs, bagarreurs et fêtards. Sans jamais aucune vulgarité, le scénariste s'impose comme l'un des artistes les plus hilarants de son époque, chacun de ses gags fonctionnant encore aujourd'hui. Comment ne pas rire encore du phrasé traduit littéralement des anglais dans Astérix chez les Bretons ? Ou de la rencontre entre Abraracourcix et Aplusbégalix dans Le Combat des Chefs ? Oui, 65 ans après sa première parution dans Pilote, Astérix est toujours un chef-d'oeuvre !

#6 Les Schtroumpfs, de Peyo (1963-...)

De Hergé à André Franquin, en passant par Edgar J. Jacobs, Morris, Jijé et Jean Van Hamme, le "Plat Pays" chanté par Jacques Brel a donné de nombreux auteurs de bandes-dessinées iconiques. N'oublions pas également Peyo, dont le chef-d'oeuvre Les Schtroumpfs continue de faire rire de nombreux enfants à travers la francophonie. En dépit du fait qu'elle soit aujourd'hui pointée du doigt pour un machisme et un antisémitisme supposés, Les Schtroumpfs n'en demeure pas moins un monument de la bande-dessinée franco-belge, bourrée d'humain et magnifiquement illustrée. Grand maître en matière d'humour de caractères, Peyo ne doit pas être résumé aux polémiques dans lesquelles on voudrait enfermer son oeuvre. 

#7 Les Tuniques Bleues, de Cauvin et Lambil (1968-...)

Née dans les années 1970 dans les pages de Spirou, Les Tuniques Bleues est peut-être la plus grande bande-dessinée de western française. Créée par le regretté Raoul Cauvin, et dessinée d'abord par Savérius, puis par Lambil, la série nous raconte les aventures de Chusterfield et Blutch, deux tuniques bleues chargées de protéger les colons pendant la Conquête de l'Ouest des peuples amérindiens lorsqu'elles ne combattent pas les Confédérés. En dépit de l'humour prononcé de la série, qui repose sur la relation houleuse entre ses deux protagonistes, Les Tuniques Bleues est une bande-dessinée extrêmement bien documentée, racontant des faits historiques (comme le Siège de Vicksburg) et mettant en scène des personnages réels (le photographe Mathew Bardy, la chirurgienne féministe et abolitionniste Mary Edwards Walker). À lire absolument !

#8 rubrique-à-brac, de Gotlib (1968-1974)

Créée en 1968 par Gotlib dans les pages de Pilote sur les conseils de son mentor et rédacteur en chef René Goscinny - avec qui il avait créé les Dingodossiers -, La Rubrique-à-brac (ou RAB) est une série de faux dossiers documentaires humoristiques, sur la vie animale, la peinture ou la science. Nul doute que ce trésor d'humour, où interviennent quelques personnages récurrents, a eu une influence majeure sur La Minute Nécessaire de Monsieur Cyclopède du grand Pierre Desproges. 

#9 Valérian et Laureline, de Pierre Christin et Jean-Claude Mézières (1970-2010)

On aurait pu également citer Enki Bilal (La Trilogie Nikopol), qui compte avec l'illustre romancier Alan Damasio (La Zone du Dehors, La Horde du Contrevent, Les Furtifs) parmi les plus grandes voix de la Science-Fiction française contemporaine. Toutefois, comment dresser une sélection des meilleures bandes-dessinées franco-belges sans citer Valérian et Laureline ? Car avant de devenir l'un des plus gros naufrages financiers de Luc Besson, il s'agit d'une remarquable bande-dessinée créée par Pierre Christin et Jean-Claude Mézières et parue pour la première fois en 1967 dans Pilote. Ce space-opéra a eu une telle influence qu'il a inspiré certains des éléments les plus iconiques de Star Wars de George Lucas.

#10 Idées Noires, d'André Franquin (1977-1983)

Génie absolu de la bande-dessinée franco-belge, Franquin est bien évidemment l'auteur des meilleurs albums de Spirou, le créateur de Gaston Lagaffe et du Marsupilami. Mais il est aussi celui qui valide l'axiome du duo de vidéastes Calmos dans leur épisode sur Tchao Pantin avec Coluche : les personnes les plus drôles sont aussi, paradoxalement, les plus tristes. Créées pour la revue Fluide Glacial de Gotlib alors qu'il faisait une dépression, les Idées Noires d'André Franquin sont de véritables bijoux d'humour noir et désespéré, où le dessinateur troque ses couleurs chatoyantes pour un noir et blanc qui a sans aucun doute marqué Manu Larcenet, et étrille la violence gratuite, les chasseurs, les militaires, les sportifs. Un haut sommet de l'humour !

#11 Thorgal, de Jean Van Hamme et Grzegorz Rosiński (1980-...)

Comment ignorer l'auteur de XIII, Largo Winch, Le Grand Pouvoir du Chninkel (variation en fantasy de l'Ancien Testament) ? On ne le peut pas bien sûr, surtout si l'on considère que ce même auteur a créé Thorgal avec son plus proche collaborateur, Grzegorz Rosiński. Faisant se rencontrer avec efficacité l'heroic-fantasy à la science-fiction, le duo mêle des inspirations scandinaves, médiévales, antiques, mais aussi des thématiques plus orientées SF comme les voyages interstellaires et les voyages temporels. L'une des grandes forces de Thorgal demeure le dessin, sublime et dynamique, de Rosiński.

#12 L'Incal, d'Alejandro Jodorowsky et Mœbius (1981-1988)

Non content d'être un réalisateur aussi fou que poète - puisqu'on lui doit l'ultra-violent western El Topo et le mystique La Montagne sacrée -, Alejandro Jodorowsky est également un génie de la bande-dessinée. Publiée dans Métal Hurlant et chez les Humanoïdes Associés, sa série L'Incal en collaboration avec le légendaire dessinateur Mœbius est un bijou de la SF française. Les aventures de John Difool, détective privé minable de classe R, recevant dans un futur dystopique une mystérieuse pyramide blanche aux pouvoirs extraordinaires appelée l'Incal lumière, continue aujourd'hui d'inspirer de nombreux auteurs grâce à son univers aussi foisonnant que délirant. 

#13 Complainte des Landes Perdues, de Jean Dufaux et Grzegorz Rosiński (1993-...)

Déjà dessinateur sur Thorgal et Le Grand Pouvoir du Chninkel de Van Hamme, Grzegorz Rosiński s'est aussi brillamment illustré avec le chef-d'oeuvre de la fantasy celtique en bande-dessinée de Jean Dufaux : Complainte des landes perdues. Le premier cycle nous raconte l'histoire de Sioban, princesse sans royaume, dont le père, le roi Sudenne, a été tué par le mage Bedlam. Trois autres cycles viennent compléter avec brio l'univers. On vous recommande bien évidemment ce classique de la fantasy francophone ! Et si vous êtes intéressés par les Celtes, ces romans et films de fantasy vous passionneront !

#14 Les Vieux Fourneaux, de Wilfrid Lupano et Paul Cauuet (2014-...)

La bande-dessinée humoristique est-elle morte avec Goscinny, Franquin, Morris et Peyo ? Absolument pas, et elle continue d'exister, comme nous le montre brillamment l'excellent Lupano avec Les Vieux Fourneaux. À l'instar du film Les Vieux de la Vieille de Gilles Grangier (avec les dialogues de Michel Audiard), cette série qui compte pour l'instant sept tomes nous raconte l'histoire d'un trio de vieillards complètement anarchistes. L'occasion pour l'auteur d'Alim le tanneur (chef-d'oeuvre de la fantasy !) de traiter de problématiques contemporaines. À lire absolument !

#15 Le Rapport de Brodeck, de Manu Larcenet (2015-2016)

Dessinateur surdoué, à l'aise dans tous les genres, Manu Larcenet a montré avec Blast - son grand cycle sur la dépression - l'immensité de son talent de conteur et de dessinateur. Mais l'artiste prend au tripes quand il adapte les oeuvres de grands romans, comme le classique de la science-fiction post-apocalyptique La Route de Cormac McCarthty, qui vient de paraître chez Dargaud et dont notre critique est à retrouver ici. On voudrait attirer votre attention sur le diptyque Le Rapport de Brodeck, d'après le roman de Philippe Claudel. Brodeck, forestier rescapé d'un camp de concentration, est mandé par les habitants d'un village alsacien de rédiger un rapport sur la mort d'un homme qu'ils ont tous tué, afin d'expliquer leur geste et obtenir le pardon. Récit profondément misanthrope, Le Rapport de Brodeck est sublimé par les dessins noirs et blancs de Larcenet, qui nous livre une oeuvre d'une force inouïe, qui entre étrangement en résonance avec le film Une vie cachée de Terrence Malick. 

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