Australie : cette araignée supporte plus de G qu'un pilote de chasse
Des scientifiques ont découvert comment le système semi-hydraulique d'une araignée sauteuse australienne lui permet de sauter rapidement sur de longues distances avec précision tout en subissant des forces G supérieures à celles des pilotes d'avion chasse. Une découverte qui pourrait révolutionner la recherche en robotique.
Maratus splendens, l'araignée aux passionnants secrets
Beaucoup les craignent et pourtant, les araignées sont nos amies (enfin selon les araignées...). D'autant plus que l'araignée du jour nous vient d'Australie, difficile donc de lui accorder quelconque confiance. Malgré tout, cette dernière est capable de véritables prouesses, des capacités uniques qui pourrait bien aider nos recherches en robotique à avancer de l'avant. L'araignée du jour, l'araignée paon splendide (Maratus splendens), est loin des araignées traditionnelles qui peuplent nos contrées.
Et pour cause, elle est capable de sauter. Les araignées sauteuses se propulsent grâce à une combinaison particulière de pression hydraulique et d'action musculaire. Et même si l'idée d'une araignée sauteuse est terrifiante, la biomécanique derrière n'a pas fini de fasciner les scientifiques. Des études menées par l'université Macquarie de Sydney ont permis d'examiner en détail la capacité de saut de l'araignée paon splendide d'Australie afin de mieux comprendre la biomécanique semi-hydraulique derrière.
"Ces araignées sont si petites qu'on pourrait en faire tenir quatre ou cinq sur l'ongle du pouce", explique Ajay Narendra, professeur associé à l'École des sciences naturelles de l'université et auteur principal et correspondant de l'étude. "Les mâles ne pèsent que deux milligrammes - l'une des araignées sauteuses les plus légères connues - tandis que les femelles sont six fois plus lourdes".
Les sauts des araignées ne sont pas actionnés par des muscles ou des ressorts. Bien qu'elles aient des muscles qui se plient dans leurs pattes, elles n'ont pas les muscles nécessaires à l'extension des pattes et à la puissance des sauts. Pour parvenir à sauter, elles se basent sur un "système de locomotion semi-hydraulique". Avant de sauter, l'araignée contracte les muscles de son céphalothorax (la tête et le thorax fusionnés des araignées) pour pousser l'hémolymphe, leur version du sang, dans ses pattes. L'hémolymphe crée alors une pression dans les pattes, ce qui les fait s'étendre rapidement. Et lorsque l'araignée relâche la pression, les pattes se déploient vers l'avant, propulsant l'araignée dans les airs avec une grande force.
Après avoir été filmées à 5000 images par seconde à l'aide d'une caméra grande vitesse, les araignées ont été relâchées dans leur habitat naturel. Les chercheurs ont ensuite procédé à une analyse manuelle image par image des séquences, en suivant différentes structures corporelles et en extrayant des coordonnées à partir desquelles ils ont pu reconstituer la trajectoire du saut. Les images ont aussi permis de percer à jour la contribution des différentes pattes au saut, dont l'apparition d'une troisième paire de pattes chez les mâles.
Des accélérations au décollage supérieures à celles de nos pilotes de chasse
Lors de cette expérience, en moyenne, les araignées mâles et femelles ont subi pendant le décollage l'équivalent de 13,03 G et 12,5 G. C'est supérieur à toutes les autres araignées sauteuses connues, et même aux valeurs rencontrées par nos pilote de chasse chevronnés qui supporter jusqu'à 8 ou 9 G. Un être humain classique peut supporter environ 5 G avant de perdre connaissance.
"Pour les animaux comme nous, dont le corps est plus rigide, la capacité à résister aux forces g est bien plus limitée que pour les araignées, dont le corps mou et rempli de fluides gère cette pression de manière bien plus efficace", explique Narendra. "Leur faible masse corporelle réduit les forces agissant sur leur corps. Cela réduit également le stress sur les différentes parties du corps car les forces sont réparties sur l'ensemble du corps".
Les résultats obtenus par les chercheurs pourraient permettre au développement de la robotique :
"Les araignées sauteuses ont une capacité exceptionnelle à contrôler leurs sauts pour atteindre des cibles spécifiques, qu'il s'agisse d'atterrir sur des surfaces ou d'attraper de petits insectes se déplaçant rapidement", explique Narendra. "Les chercheurs en robotique seront probablement inspirés pour construire des robots basés sur les systèmes semi-hydrauliques des araignées sauteuses qui ont des mouvements efficaces dirigés vers un objectif."
Des araignées minuscules qui pourraient bien nous offrir des avancées majeures dans le domaine de la robotique.