COUP DE COEUR : Watchmen, la nouvelle série HBO
C'était certainement l'une des séries les plus attendues de l'année 2019. Depuis le dimanche 20 octobre, le monde a les yeux fixés sur la série Watchmen. Il faut dire que cette série a de nombreux atouts. Tout d'abord, il s'agit d'une suite (doublée d'une relecture) au chef d'oeuvre d'Alan Moore, que beaucoup considèrent (à raison) comme le plus grand scénariste de comics de tous les temps. Ensuite, c'est la chaîne HBO qui s'est occupée de la production de la série, et la chaîne est synonyme d'extrême qualité (on leur doit quelques-uns des plus grands chefs d'oeuvre télévisuels, que ce soit avec Game of Thrones, Westworld, la saison 1 de True Detective ou plus récemment Chernobyl). Enfin, c'est Damon Lindelof, scénariste de Lost et showrunner de la série HBO la plus sous-cotée de l'Histoire, The Leftovers. Bref, autant d'arguments qui ont titillé notre curiosité. On a vu les deux premiers épisodes, et c'est un véritable coup de coeur. On vous dit pourquoi.
Dans la continuité du comics d'Alan Moore
On ne dira jamais à quel point le comics d'Alan Moore et Dave Gibbons a bouleversé l'écriture des comics en général, et des comics de super-héros en particulier. Watchmen est aujourd'hui encore considéré comme un chef d'oeuvre intouchable, un roman graphique parfait tant au niveau de son écriture que de son approche graphique. Et on ne peut pas donner tort à ce constat. Aussi, bien que nous ayons apprécié la tentative d'adaptation de Zack Snyder, qui tentait de reproduire d'une manière quasi-névrotique les cases du comics, ses changements restaient néanmoins regrettables (Rorschach était moins conservateur, et la fin a été modifiée).
La série Watchmen est donc une suite (autant qu'un hommage) au comics. Elle en reprend les thématiques (réflexion métadiégétique sur les justiciers masqués, monde sur le bord de l'implosion et autres thématiques socio-politiques) et la tonalité (un rythme assez lent, un ton sombre et nihiliste).
Bien que l'action se passe en 2019, il n'y a pas de doute : on est bien dans l'univers de Watchmen. Un monde alternatif toujours bouleversé par l'arrivée de Docteur Manhattan, où les justiciers masqués sont hors-la-loi depuis l'adoption de la loi Keane, et où l'épilogue du comics laisse en encore des séquelles (des pluies de calamars, notamment). Le journal de Rorschach, dans lequel est consignée toute la vérité concernant l'affaire Ozymandias a été publié, et un groupuscule terroriste suprématiste blanc, appelé le Septième Kavalerie, s'est approprié l'image de Rorschach, et mène des attaques ciblées contre les forces de polices, notamment lors de la Nuit Blanche, où une quarantaine de policiers ont été attaqués par des membres du Septième Kavalerie. Depuis, les policiers sont masqués, anonymes. Docteur Manhattan, quant à lui, est toujours sur Mars, et Ozymandias est, officiellement du moins, mort.
Ainsi, tout ce qui se passe dans la série Watchmen (du moins, à ce stade) est dans la continuité logique du comics. Même la présidence de Robert Redford était stipulée dans la dernière page du comics, dans laquelle un patron de presse dit à son assistant, sur le ton de la plaisanterie, que Robert Redford pourrait devenir président des Etats-Unis. Certains (qui n'ont pas lu le comics, ou qui en ont un souvenir partiel) ont râlé du fait qu'un groupe suprématiste blanc s'était inspiré de Rorschach. Il est vrai que, en dépit du fait que le personnage ait gagné la sympathie des lecteurs (du fait sans doute de sa stature, de son isolement, de son passé douloureux, de sa morale, etc), certains tendent à oublier le fait que s'il n'est pas un suprématiste blanc, Rorschach est un ultra-conservateur, misogyne, homophobe, louant Reagan, etc. Donc qu'un groupe d'extrême droite en fasse son symbole, accentuant son conservatisme, le tirant vers du suprématisme, ce n'est pas étonnant.
De nouveaux personnages attachants
L'une des grandes forces de cette nouvelle série, c'est bien évidemment ses personnages. Les personnages du comics étaient marquants, parce qu'ils avaient tous une identité très forte, de Rorschach à Docteur Manhattan, du Hibou au Spectre Soyeux, du Comédien à Ozymandias. Jamais caricaturaux, les personnages de Watchmen était des personnages extrêmement bien écrits, et c'est ce qui nous permettait de nous y attacher. Qu'ils soient puissants comme un dieu, ou ordinairement faibles, les personnages de Watchmen sont avant tout tous terriblement humains. Ils ont une sexualité, des peurs, névroses, qui rehaussent le goût de leurs qualités, à la manière d'un plat savamment épicé.
Et les nouveaux personnages de la série Watchmen sont créés sur le même modèle. Angela Abar, aka Sister Night, personnage principal du show, est terriblement touchante. Faut dire que l'interprétation de Regina King (The Leftovers, Si Beale Street pouvait parler) souffre, comme à son habitude, d'aucun défaut. Regina King prouve une fois encore quelle fantastique actrice elle est. Looking Glass, que joue magnifiquement Tim Blake Nelson (O' Brother, La Ballade de Buster Scruggs), est un personnage particulièrement intéressant, et on voudrait le voir plus souvent. Il est notamment dans une scène extraordinaire, une scène d'interrogatoire absolument géniale, brillant tant par son originalité que par sa tension narrative et son interprétation. Red Scare, plus anecdotique à ce stade, semble de son côté avoir un très gros potentiel, et on ne doute pas du fait qu'il saura gagner en importance au fil des épisodes. Enfin, le chef Judd, interprété par le génial Don Johnson (Django Unchained), est lui aussi extrêmement touchant.
Ce qui est très appréciable, c'est qu'à aucun moment Watchmen (la série) ne semble crouler sous le poids de son illustre aîné de papier. Si la série fait de très nombreux clins d'oeil, elle laisse une place suffisante à ses nouveaux personnages, et cela passe par un culte du mystère concernant les anciens. On a bien évidemment croisé Ozymandias, qu'interprète avec classe le légendaire Jeremy Irons (M. Butterfly, Kingdom of Heaven, Batman v Superman), et on a aperçu deux secondes d'un reportage télé sur Docteur Manhattan, mais aucune nouvelle du Spectre Soyeux ni même du Hibou, bien que de nombreux éléments tendent à laisser penser qu'un personnage bien précis pourrait être Le Hibou (tasse de Hibou, exemplaire du livre Sous le masque, vaisseau et lunettes de vision nocturne semblables à celui du Justicier).
Une production aux petits oignons
Dès l'introduction du pilote, on a été bluffé par la qualité de production et de la réalisation. Comme d'habitude, HBO a mis les moyens suffisants pour que cette nouvelle série brille par son esthétique. L'introduction, qui met en relief l'histoire méconnue du massacre de Tulsa en 1921, nous a donné des frissons. La réalisation est exemplaire, les réalisateurs ne se contentant pas d'un simple plan/contre-plan. La photographie est très belle. On adore également la musique originale de Watchmen, confiée à Atticus Ross et Trent Reznor, du groupe de rock et métal indus Nine Inch Nails, qui apporte une atmosphère électro avec des guitares saturées vraiment appréciables, ajoutant plus d'intensité à certaines scènes. La BO bénéficie également d'une variété de titres (classique, rap, rock), et on a hâte de pouvoir se procurer le disque de la BO lorsqu'elle sortira, courant décembre 2019.
Vous l'aurez compris, nous avons été conquis par les deux premiers épisodes de cette nouvelle série HBO, et on croise les doigts pour que le reste de la série soit d'aussi bonne qualité.
Quelles sont les dates de diffusions ?
Voici les dates de diffusion (date française) :
Épisode 1 : Lundi 21 octobre
Épisode 2 : Lundi 28 octobre
Épisode 3 : Lundi 4 novembre
Épisode 4 : Lundi 11 novembre
Épisode 5 : Lundi 18 novembre
Épisode 6 : Lundi 25 novembre
Épisode 7 : Lundi 2 décembre
Épisode 8 : Lundi 9 décembre
Épisode 9 : Lundi 16 décembre
Mais le thème pour l'instant est assez différent.
La série a pour l'instant, l'air de traiter des tensions "raciales" des Etats-Unis, de façon plutôt intelligente, sans doute grâce à l'univers, il faudra attendre les 9 épisodes pour savoir si cette série est finalement vraiment bonne ou simplement de la propagande SJW.