Focus sur Brian K. Vaughan : Saga, Y, le dernier homme, Ex Machina...
Non content d’être l’un des auteurs de comics les plus prolifiques de ces dernières années (comme Rick Remender, il écrit le scénario de trois séries en même temps !), Brian K. Vaughan est également le meilleur auteur de sa génération.
1- 2002-2008 : Y, le dernier homme
Alors que le jeune Yorick Brown parlait au téléphone de son singe Esperluette avec sa petite amie Beth, étudiant en Australie, le monde est frappé par une épidémie : tous les porteurs du chromosome Y meurt en même temps. Tous, sauf deux êtres. Yorick et son singe. Dans un monde amputé de la moitié de sa population qui tente de survivre, Yorick est poursuivi par des féministes aliénées par la haine, par le gouvernement et par sa faiblesse. Heureusement, il est accompagné de l’Agent 355. Yorick est peut-être la seule chance de sauver l’humanité. Mais il doit retrouver Beth…
Dès sa première grosse série, dessinée par Pia Guerra, Brian K. Vaughan impose par son style, qui met tout le monde d’accord. Humour, violence, sexe, et un gros cliffhanger à chaque fin de chapitre ! Y, le dernier homme est peut-être la meilleure bande dessinée sortie dans les années 2000. Le suspens est omniprésent, jusque dans le titre. En anglais, Y le dernier homme s’écrit Y the last man. Si vous le prononcez en anglais, vous aurez l’impression de dire : « Why’s the last man ? » Pourquoi est-il le dernier homme ? Les soixante chapitres de cette série exceptionnelle sont publiés en cinq tomes chez Urban Comics. On entend régulièrement parler d’adaptation en série TV. Rien d’étonnant à cela ! D’abord, la série de comics est taillée pour ; ensuite, Brian K. Vaughan a eu un rôle majeur dans le monde des séries TV, en écrivant le scénario de Lost et de Under the dome.
Pour l’acheter : 5 tomes, 22,50 euros, chez Urban Comics.
2- 2004-2010 : Ex Machina
Alors que sa série Y le dernier homme attirait un lectorat toujours plus ample, Brian K. Vaughan, déjà reconnu comme un auteur culte, publie une seconde maxi-série : Ex Machina. Mitchell Hundred est un ancien super-héros, qui se reconverti en Maire de New York. Comme dans Y, Brian K. Vaughan joue sur les flash-back, offrant un scénario qui prend place sur deux temporalités différentes : Mitchell en super-héros, Mitchell en maire de New York.
Ex Machina est l’occasion pour Vaughan de se servir de ses compétences acquises pendant l’écriture de Y pour faire une oeuvre plus 1er degré, plus ouvertement politique. Il y parle de la politique, de l’homosexualité, et d’une Amérique choquée par les attentats du 11 septembre 2001. D’ailleurs, c’est à cette Amérique que le scénariste s’adresse : il faut imiter, en un sens, Mitchell. En remettant dans un placard son costume de super-héros, il privilégie la diplomatie et la réflexion à une justice faite de bric, de broc et de coups. Une oeuvre majeure dans la carrière de Brian K. Vaughan !
Pour l’acheter : actuellement 3 tomes en librairies : 19,39 chacun, chez Urban Comics. (Le tome 4 est prévu pour juin 2016.)
3- 2006 : Les Seigneurs de Bagdad
En 2006, Brian K. Vaughan surprend encore avec un roman graphique exceptionnel : Les Seigneurs de Badgad. 2003 : les U.S.A. répondent aux attentats du 11 septembre 2001 par des frappes aériennes sur Bagdad. Des bombes sont lâchées partout dans la ville. La destruction du zoo permet à une famille de lions de s’évader. Commence alors pour eux un voyage dans la ville déserte, avant d’être abattus par les G.I. américains.
En racontant l’histoire vraie de cette famille de lions, au moyen de la prosopopée (figure de style de la famille de la personnification, consistant à faire parler les animaux), Vaughan livre son livre le plus ouvertement politique. Il s’était déjà intéressé à la situation au Moyen-Orient (quelques épisodes de Y s’y déroulent !), mais jamais son opinion n’avait été aussi claire. Brian K. Vaughan se situe dans la lignée de Moore, Miller, Ennis, Ellis et Millar, en livrant une oeuvre engagée, violente et poétique.
Pour l’acheter : 15 euros, chez Urban Comics.
4- 2012-… : Saga
En 2012, Brian K. Vaughan est papa. Les questionnements métaphysiques qui résultent de cet événement personnel lui donneront envie d’écrire sur la paternité. C’est comme ça qu’est né Saga. C’est important d’expliquer les origines du plus gros chef d’oeuvre depuis Watchmen ! Saga raconte les aventures de Marko, Alana et leur fille Hazel. Dans une galaxie tiraillée par une guerre incessante qui opposent une planète (peuplée d’êtres ailés) et sa lune (peuplée d’être cornus), deux êtres, Marko (cornu) et Alana (ailée) tombent amoureux l’un de l’autre. De cet amour interdit, naîtra Hazel, petit bébé cornu et ailé, devenu le symbole d’une paix inconcevable. Pour protéger leur fille, Marko et Alana devront fuir jusque dans les tréfonds d’une galaxie où tout peut arriver. Ils y rencontreront des fantômes, un castor qui parle, des chasseurs de primes arachnides, et un Prince Robot qui veut leur mort à tout prix !
Saga est le meilleur comic-book indépendant depuis vingt ans ! Le talent de Brian K. Vaughan (qui s’est offert les talents de l’incroyable dessinatrice Fiona Staples) atteint là son paroxysme : après 5 tomes publiés en France, le suspens est toujours à son comble, Vaughan multipliant les retournements de situation ! On a dit de ce space-opéra que c’était un mixte entre Star Wars et Game of Thrones ! C’est on ne peut plus vrai, tant ce cocktail de violence, de sexe, d’humour et de créatures étranges, est riche ! Riche en émotions, surtout, puisque Vaughan se montre plus poétique que jamais ! Enfin, comble de l’originalité (et du génie ?) : Vaughan a choisi comme narratrice pour son histoire, Hazel, le bébé, qui commente les choix de ses parents et des autres personnages ! UN CHEF D’OEUVRE ! Si comme moi, vous ne pouvez attendre la sortie en France du tome 6 (en juin 2016 normalement), vous pouvez toujours lire les chapitres en anglais, tous les mois, chez votre vendeur de bandes-dessinées le plus proche ! (Le chapitre #33) doit sortir le mercredi 27 janvier.
Pour l’acheter : 9,76 euros par tomes, chez Urban Comics. 3 euros par chapitre, en VO, chez Image Comics.
5- 2015 : We Stand On Guard
Alors qu’il écrivait Saga, Brian K. Vaughan a publié une mini-série de six chapitres, intitulée We Stand On Guard. Si pour l’instant elle n’est disponible qu’en VO, cette série publiée chez Image Comics est un autre chef d’oeuvre, d’un niveau presque égal à Y le dernier homme ou Saga. Au XXIIème siècle, le Monde connaît une crise écologique sans précédent : l’eau devient une denrée rare. Le Canada, cependant, parvient à vivre plus paisiblement, grâce à ses ressources hydrauliques. Mais quand les États-Unis envahissent le Canada, massacrant les civils, le destin du pays à la feuille d’érable reposera sur une équipe de résistants, les Two-Four. Parmi eux, Amber, leur nouvelle recrue, jeune femme qui cherche son frère, fait prisonnier par les Américains.
Dans cette mini-série, Brian K. Vaughan, Américain marié à une Canadienne, met tout son savoir-faire en matière de suspens ! Comme dans ses autres séries, il clôt chacun de ses six chapitres par un cliffhanger qui donne cruellement envie de connaître la suite ! Accompagné au dessin par le remarquable Steve Skroce, il livre une épopée politique aussi sauvage que poétique ! Chapeau bas Monsieur Vaughan !
6- 2015-… : Paper Girls
Comme Rick Remender, Brian K. Vaughan cumule les séries : en 2015, alors qu’il était aux commandes de Saga, il publiait coup sur coup We Stand on Guard et Paper Girls. Les Paper Girls, ce sont des filles qui distribuent le journal à vélo, dans une petite ville de l’Ohio, dans les eighties. En apparence, la nouvelle série de Vaughan est ancrée dans le réel, et ce malgré un début onirique. Vaughan en profite pour faire une analyse de la place de la femme en Amérique. Cependant, dès la fin du premier chapitre, on comprend que le fantastique et l’imaginaire de l’auteur de Saga seront au rendez-vous, pour notre plus grand bonheur.
À mon avis, Paper Girls est une série de comics tournée sur la carrière télévisuelle de Vaughan, qui a signé le scénario de Lost et de Under the dome. Accompagné au dessin par le grand Cliff Chiang, qui donne ici dans un style à la fois très coloré et cinématographique, le scénariste fait un hommage exceptionnel au cinéma. On y voit Freddie (des Griffes de la nuit), des ptérodactyles (comme dans Jurassic Park), etc. Bref, un autre grand coup signé Vaughan !
Pour l’acheter : quatre chapitres sont actuellement en vente en VO, pour 1,89 euros.