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Que ressent-on quand on meurt ? Les expériences de mort imminente décryptées

De Raphaël Giro - Posté le 3 février 2021 à 15h36 dans Science

La vie après la mort est une question que tout le monde s'est déjà posé. Évidemment, la science-fiction ne fait pas exception, mais comment la science aborde-t-elle ce genre de sujet ?

Une définition pas évidente

Dans le monde de la fiction, la thématique de la vie au-delà de la vie terrestre est régulièrement abordée. Le film d'animation Soul des studios Pixar, sorti récemment sur Disney+, abordait déjà cette question avec le Grand-Avant et le Grand-Après (vous pouvez d'ailleurs retrouver notre critique du film, en cliquant ici.). Dans Lovely Bones, on observe avec l'héroïne son meurtrier échapper aux policiers, et on partage sa détresse qui se prolonge après sa mort.

La méthode scientifique consiste à se baser sur l’expérience. Le propre de la mort, jusqu'à preuve du contraire, est que l'on n'en revient pas pour en témoigner. Alors, pour son étude, la science va s'intéresser à ce qui se rapproche le plus du témoignage de la mort, ce que l'on appelle l’expérience de mort imminente (EMI).

La mort, tout le monde c'est ce que c'est, et pourtant, il existe deux définition scientifiques qui peuvent se contredire pendant une certaine période. La mort clinique est décrétée quand le résultat de tests répétés sur l'activité musculaire spontanée, les réflexes à la douleur et la respiration sont négatifs. La mort cérébrale, quant à elle, c'est l'absence d'activité cérébrale définitive. En l'absence d'intervention médicale, l'une de ces mort entraîne forcément l'autre. Si notre électroencéphalograme devient plat, on est en mort cérébrale, et les muscles (dont les poumons)  ne fonctionnent plus. La mort clinique advient rapidement. Si on ne respire plus, à cause d'un arrêt cardiaque par exemple, on est en état de mort clinique, et le cerveau n'étant plus irrigué, la mort cérébrale advient au bout de 30 secondes environ d'après Jimo Borjigi de l'université du Michigan. D'après Sam Parnia, auteur d'une toute nouvelle étude, qui a duré plus de 4 ans et sur 2060 patients, une activité cérébrale non détectée ne signifie pas absente. Et pour lui, la conscience resterait éveillée jusqu'à 3 minutes après un arrêt cardiaque.

Des records incroyables

Mais avec une intervention médicale, il arrive que l'on puisse être en mort clinique mais non cérébrale, ou l'inverse. Howard Snitzer a fait un arrêt cardiaque, et les secours ont mis 1h36 à le réanimer, et pendant tout ce temps là, il n'était pas en état de mort cérébrale. A l'opposé, Eva Votavova, une Tchèque de 27 ans a donné naissance à une fille alors qu'elle était en mort cérébrale depuis 117 jours, et cette fois, la mort clinique avait été évitée par un respirateur artificiel. La définition de la mort est donc plus complexe qu'il n'y parait au premier abord. Dans cet article, nous allons nous intéresser au premier exemple, une mort clinique, mais sans mort cérébrale, en nous penchant sur ce que la personne ressent pendant toute cette période, c'est précisément ce que l'on appelle des EMI ou Expérience de Mort Imminente. Selon une méta analyse de Marie Thonnas, psychologue à l'Université de Liège, les EMI sont observées dans 2% à 12% des arrêts cardiaques.

Juste après celui-ci, le sang n'est plus alimenté en oxygène, et il y a une hausse du dioxyde de carbone. Évidemment, l'absence d’irrigation du cerveau en oxygène entraîne de graves conséquences. Nous ne voyons le monde qu'au travers de notre cerveau. Le langage, la mémoire et le raisonnement sont des fonctions cognitives supérieures qui sont prises en charge par le cortex préfrontal. En revanche, le système visuel, le toucher, l'audition et la perception de l'espace participent à l'intégration des modalités sensorielles qui prennent place dans le lobe pariétal. Pour ce qui est de certaines émotions, les neurotransmetteurs jouent un rôle très important. La dopamine correspond à l'hormone du plaisir du risque. A l'aide du système de la récompense, elle gratifie une prise de risque et aide à la motivation. A l'inverse, la sérotonine, elle, correspond au plaisir de ce qui est connu et acquis. Lors d'une douleur intense, ou un orgasme c'est l'endorphine qui est sécrétée par notre organisme, et elle correspond à une sensation de bien être, voire d'euphorie. L'arrêt cardiaque ne signifie pas l'absence de fonctionnement du cerveau ni de la vue et de l'ouïe, mais ils seront impactés par lui.

Des sensations mortelles

L'une des expériences que rapporte les témoignages d'EMI est la sensation de décorporation, c'est à dire de sortir de son corps et de l'observer de l’extérieur. Le lobe temporal est la partie du cerveau responsable de l'audition, le langage, la mémoire et la vision. Dans celui-ci, il y a le gyrus angulaire, dédié au langage complexe et à la perception spatio-temporelle. En 2002, Olaf Blake publie dans Nature, une étude relatant la stimulation artificielle du gyrus angulaire, lors d'une opération sur personne épileptique. Après l'opération, le patient a décrit une sensation de déplacement du corps. 5 ans plus tard, à l'aide de la réalité virtuelle, en donnant des informations sensorielles contradictoires, le cerveau des patients n'a plus su comment les interpréter et les aires temporales ont été troublées. Plus tard, les patients ont décrit une sensation de voir leur propre corps, en partie, l'impression que l'esprit s'était détaché du corps. Ainsi, même mourant, le cerveau reste actif. La conclusion de la psychologue Marie Thonnard est que :

Les souvenirs de cette expérience ne peuvent être vus comme ceux d'événements purement imaginaires. Au contraire, leur origine physiologique pourrait les amener à être vraiment perçus, bien que non réellement vécus.

D'autres témoignages d'EMI relatent une impression de ralenti. La partie émotionnelle du cerveau est, en partie, prise en charge par le système limbique. Dans celui-ci, l'amygdale est liée à l'agressivité et à la peur, mais aussi à toute mémorisation impliquant une charge émotionnelle. David Eagleman, chercheur en neurosciences, a fait une expérience pour étudier cette impression de ralenti. Les cobayes ont fait une chute libre de 3 secondes, dos au sol. Evidemment un filet était disposé au sol pour les rattraper. Ils décrivent une sensation de ralenti semblable aux témoignages des EMI. Naturellement, notre système limbique fait un tri dans ce qu'il nous arrive et enregistre dans notre mémoire seulement l'essentiel. Eagleman interprète, qu'en situation de danger, il y a une activation de l'amygdale pour tout enregistrer. Etant donné que plus on a de souvenirs sur un évènement, plus on a l'impression qu'il a duré longtemps, les cobayes ont eu la sensations que le temps s'était ralenti.

Malgré toutes ces explications, il reste beaucoup de chose inexpliquées. Mario Beauregard, spécialiste canadien en neurobiologie, explique que les stimulations des différentes régions du cerveau ne réussissent à reproduire qu'une partie des symptômes décrits dans les témoignages d'EMI. Par exemple, la capacité de voir une scène d'un point de vue entièrement extérieur, ou des objets dans une autre pièce, n'a pas été reproduit.

Mais, même si l'on réussissait vraiment à reproduire toutes ces expériences, cela ne démontrerait pas l'absence de vie après la mort, puisque dans tout ces cas, la mort n'est pas arrivée. C'est la limite de la science, elle ne peut étudier que ce qui est expérimentable, et la mort de l'est pas, cela renvoie dos à dos les matérialistes et religieux.

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Source(s) : nrp Université de Liège

Mots-Clés : sciencesMortsoulpixar

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Commentaires (6)

Par Old Yoda, il y a 3 ans :

Ca, c'est ce qui s'appelle un article passionnant !

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Par Rhumge, il y a 3 ans :

Réponse qu'on aura tous un jour de toute façon.

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Par minouch2, il y a 3 ans :

merci pour cet article tres interessant

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Par Voyd, il y a 3 ans :

Dès que je vois un article de Raphael je le lis sans hésiter et c'est toujours un plaisir, encore un article de qualité rare comme on en voit peu

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Par Erzog, il y a 3 ans :

"La mort, tout le monde c'est ce que c'est"....petite faute, rien de bien méchant XD

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Par Keny, il y a 3 ans :

Avant la naissance y avait rien, après notre mort y aura rien.

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