Le Seigneur des anneaux et Narnia : histoire d'un clash entre les deux auteurs
Tolkien et C.S. Lewis sont les auteurs respectifs du Seigneur des Anneaux et du Monde de Narnia. Leur influence mutuelle n'étant plus à démontrer, nous vous proposons de les découvrir non pas comme des génies (bien qu'ils le soient), mais comme des Hommes, capables de ressentir de la jalousie, ou, à l'inverse, une affection si grande qu'elle a pu traverser les décennies.
Que vous préfériez arpenter la Terre du Milieu en compagnie de Sam Gamegie ou que vous soyez plutôt du genre à faire un bout de chemin avec Aslan, l'histoire commune de Tolkien et de C.S. Lewis ne peut pas vous laisser indifférent !
L'histoire de leur rencontre
Les deux hommes ont connu un passé difficile. Tolkien devient orphelin à 12 ans, et Lewis, qui a perdu sa mère à l'âge de 10 ans, est plus ou moins élevé par un père complètement dépassé par la situation.
Tout deux par la suite sont envoyés combattre lors de la Première Guerre mondiale et sont témoins des ravages de la Seconde Guerre mondiale en Angleterre. Le cours de leur vie a donc été marqué pas les mêmes événements traumatisants, ce qui explique en partie la grande proximité qui s'est installée entre eux durant plus de trente ans.
Lorsque les deux hommes étaient amenés à se voir, ils étaient chaleureux l'un envers l'autre, bien que cette proximité ne transparaisse jamais dans les lettres qu'ils s'écrivaient mutuellement. À titre d'exemple, C.S. Lewis n'appellera jamais Tolkien par son prénom, et certains diront même qu'il ne s'en est jamais souvenu, et qu'il a donc préféré le surnommer "Tollers" tout au long de ces années. Vérité ou non, Lewis dira volontiers à quiconque veut l'entendre que Tolkien est un Homme "un peu perdu et très particulier", ce qui, selon les témoignages de l'époque, semble se vérifier. Mais après tout, les grands esprits ne se font-ils par remarquer comme cela ?
Une imagination débordante
Les deux hommes firent partie du même cercle littéraire d'Oxford, les Inklings, dans les années 1930-1940. Au sein de ce cercle, le genre fantastique était particulièrement mis en avant. On imagine donc la joie que pouvait rencontrer Tolkien et Lewis lorsqu'ils évoquaient leur idée commune, à savoir que la littérature fantastique connaîtrait un succès florissant dans les décennies à venir. Oui, ces hommes étaient ce que l'on peut appeler des visionnaires.
Tourné depuis toujours vers les livres, on comprend que, pour Tolkien, ses romans sont le véritable chef-d'oeuvre de sa vie. Ce dernier avait tant le sens du détail qu'il a passé pas moins de quatorze ans à la rédaction du Seigneur des anneaux.
Créateur d'une mythologie complète autour des langues qu'il prend plaisir à inventer, la Terre du Milieu prend forme au cours de ses multiples écrits. Le Hobbit paraît avant le Seigneur des anneaux, puis se fait attendre le fameux Silmarillion, la mythologie très détaillée de Tolkien sur laquelle il travaillera jusqu'à sa mort, et qui sera publiée à titre posthume par son fils.
Quant à Lewis, il n'a aucun mal à imaginer notre monde sous un nouvel angle et à créer des romans qui feront la joie des enfants. Lewis a en effet toujours davantage destiné ses créations à la jeunesse que Tolkien, qui jugeait que la grande littérature ne pouvait pas être comprise par tout le monde. Les deux hommes ont ainsi traversé une grande partie du siècle dernier main dans la main, et pourtant, malgré de nombreuses marques de bienveillance, tout deux entretenaient une relation compliquée. Entre jalousie et appéciation personnelle, leur route semblait se séparer petit à petit, et pourtant, l'amour du fantastique et l'amitié qu'ils se portaient les ramenaient toujours sur le même chemin.
De sévères critiques envers leurs oeuvres
Il faut reconnaître que Tolkien a toujours été plus critique envers C.S. Lewis que l'inverse. Il supportait mal la rapidité avec laquelle Lewis avait écrit Les Chroniques de Narnia, lui qui mettait tant de temps à se relire et qui avait un très grand souci du détail. 7 tomes en 7 ans pour Lewis, un record que Tolkien n'a jamais pu battre !
Tolkien expliquera assez brutalement à C.S. Lewis qu'il n'apprécie pas vraiment Les Chroniques de Narnia, trop peu consistantes à son goût. Cette idée selon laquelle Lewis n'a pas donné assez de détails et de corps aux différents épisodes de Narnia restera ancrée dans l'esprit de Tolkien, qui mettra par la suite les oeuvres de Lewis dans le même panier. Tolkien n'aura de ce fait que très peu de sympathie pour la majeure partie de l'oeuvre de Lewis, ce qui ne manquera pas de faire réagir ce dernier. Lewis, victime des attaques de Tolkien, protestera en effet régulièrement contre les vives critiques de son ami d'Oxford.
Lewis lui aussi formula de nombreux commentaires, parfois déplaisants, visant à améliorer les écrits de Tolkien. Mais comme le dit si bien l'auteur des Chroniques de Narnia :
Tolkien réagit à la critique de deux façons [...] Soit il recommence tout depuis le début, soit il n'en tient aucun compte.
Si Tolkien semblait rester de marbre envers les critiques, celles de Lewis le touchèrent plus d'une fois, et il s'éloigna de lui dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, sans toutefois couper totalement les ponts.
Une amitié véritable
Malgré la sévérité des jugements émis et la distance qui a été mise entre eux dès 1945, les deux auteurs ont continué d'entretenir cette relation pleine de hauts et de bas jusqu'à la mort de Lewis, en 1963.
Tolkien quant à lui a affirmé qu'il n'aurait jamais pu terminer l'oeuvre de sa vie, Le Seigneur des anneaux, sans les encouragements répétés de C.S. Lewis. Cette présence au fil des années a permis à Tolkien de parvenir à avancer l'écriture du fameux Silmarillion.
Qui plus est, preuve de cette amitié incroyable entre les deux hommes, il faut rappeler que Lewis a servi de modèle pour la voix de Treebeard dans Le Seigneur des anneaux, et que Tolkien, lui, a servi de modèle pour le personnage de Ransom dans la trilogie de Lewis.
Si Lewis s'est basé sur sa relation à la fois conflictuelle et fraternelle qu'il entretenait avec Tolkien, on comprend donc mieux cette citation :
L’amitié, dans un certain sens est – et je ne le dis pas dans un sens péjoratif – le moins normal des amours ; le moins instinctif, organique, biologique, social et nécessaire.
L'amitié, aussi belle qu'elle a pu être, a en effet dû lui paraître bien compliquée.
Malgré des avis très divergents sur la littérature, Tolkien et Lewis continuèrent donc de s'encourager tout au long de leur vie, cherchant sans doute à ce que l'autre se dépasse continuellement. Les deux hommes se tirèrent ainsi vers le haut malgré s'être écrit des phrases manquant parfois de tact. La profonde sincérité avec laquelle ils ont vécu leur relation permet d'expliquer qu'ils aient pu s’encourager réciproquement à terminer leurs projets littéraires respectifs, malgré une divergence d'opinion qui aurait pu leur coûter plus d'une séparation.
Mais je ne dirai pas exceptionnel
Ceci dit, l'univers reste riche, mais moins que celui de tolkien évidemment.