Critique Dune : Le Seigneur des Anneaux de Denis Villeneuve (sans spoilers)
Nous avons eu la chance de découvrir au Grand Rex, lors de l'avant-première, le dernier film de Denis Villeneuve, Dune. Cette expérience fut captivante, et nous souhaitions vous en partager une critique, mêlée de quelques explications, nécessaires pour ceux qui ne connaîtraient pas tous les détails de cette adaptation du roman de Frank Herbert. Il s'agit-là d'une critique sans spoils, afin que chacun puisse la lire, et profiter du film comme il se doit, qui paraît le 15 septembre prochain au cinéma.
Le synopsis de Dune
Notre histoire commence à Caladan, une planète-océan, et le fief de la Maison Atréides. Paul Atréides est le personnage principal du film, et il est le fils du Duc, et de Lady Jessica. Il est appelé à quitter Caladan pour se rendre sur Arrakis, une planète hostile, pleine de dangers, sur laquelle vivent les Fremen (un peuple autochtone nomade, autonome, et surtout, libre). Les Harkonnen (une autre Grande Maison, au même titre que les Atréides), qui récoltaient l'épice sur Arrakis (un produit qui allonge l'espérance de vie, et qui est surtout recherché par les navigateurs de la Guilde Spatiale, puisqu'elle éveille leurs pouvoirs prophétiques), viennent de quitter la planète sur ordre de l'empereur, et la Maison Atréides doit maintenant s'assurer de la bonne gestion de la planète.
Paul Atréides n'est cependant pas un être comme les autres, puisqu'il a non seulement certaines aptitudes physiques, mais aussi certaines aptitudes mentales particulières, presque divines. Dune est un voyage épique, qui nous conte avant tout la passation de pouvoir entre un père et son fils, et la naissance d'un personnage fort, qui comprend peu à peu les enjeux politiques et religieux d'un monde complexe, dont on dit qu'il serait le Messie.
Un rythme effréné
Si vous n'avez pas lu Dune, ou que votre mémoire vous fait défaut, n'ayez aucune crainte. L'oeuvre de Denis Villeneuve démarre sur les chapeaux de roues, et reprend tous les éléments importants des livres. Le rythme est très soutenu, voire même effrené, et on le comprend aisément tant l'univers de Dune est riche.
Il faut tout montrer : l'aspect prophétique et religieux des choses, le fait que les Fremen ne puissent pas bénéficier de l'épice alors qu'elle se trouve en abondance sur leurs propres terres, les enjeux politiques et sociaux qui se trouvent derrière chaque acte, les scènes d'action, les paysages venus d'ailleurs, la faune de Arrakis (avec notamment les vers des sables, aussi appelés "Shai-Hulud"), et bien évidemment, des équipements et des inventions qui ont aussi fait la renommée de l'oeuvre de Herbert dans le domaine de la SF (telles que les distilles par exemple, des combinaisons que vous allez certainement beaucoup aimer tant elles sont ingénieuses). Chaque thématique abordée dans les romans l'est aussi dans le film de Villeneuve, ce qui en fait une très bonne adaptation, mais une adaptation au rythme extrêmement soutenu, toutefois.
Des personnages féminins très bons
Plusieurs personnages féminins forts entourent Paul Atréides, à savoir Lady Jessica, sa mère, mais aussi Zendaya, notamment via ses rêves, et le Bene Gesserit. Le Bene Gesserit est une communauté de type religieux, dans un monde sans Dieu. Voici la litanie qui a été pensée par le Bene Gesserit, et que Jessica a enseignée à Paul :
Je ne connaîtrai pas la peur car la peur tue l'esprit. La peur est la petite mort qui conduit à l'oblitération totale. J'affronterai ma peur. Je lui permettrai de passer sur moi, au travers de moi. Et lorsqu'elle sera passée, je tournerai mon oeil intérieur sur son chemin. Et là où elle sera passée, il n'y aura plus rien. Rien que moi.
Ces mots nous donnent une idée de la complexité de cette communauté sainte, qui prône un idéal de maîtrise de soi, et qui amène une des premières scènes magistrales du film. Le Bene Gesserit est aussi à l'origine de La Voix, qui s'avère très impressionnante dans le film de Villeneuve. La Voix est l'arme la plus remarquable du Bene Gesserit, puisqu'elle permet d'ordonner, et de dominer les autres. Le Bene Gesserit est craint, et cette impression de sainteté et de puissance est parfaitement retranscrite dans Dune. Les membres laissent une aura de peur derrière elle, qui ne fait qu'éveiller la colère et le défi qui luisent dans les yeux de Paul.
Pour en revenir à Lady Jessica, la mère de Paul, cette dernière forme un duo remarquable avec son fils. Zendaya, dans le rôle de Chani, assure quant à elle la fonction charme du film, mais elle a aussi un rôle bien plus important, celui de guide. Elle est le personnage inaccessible, lointain, là encore, presque divin, qui conforte Paul dans ses choix.
Une esthétique bluffante
Passons maintenant à l'esthétique du film. Nous sommes face, ici, à un spectacle visuel épique, qui semble venu d'ailleurs. Les plans de Caladan et de l'espace sont déjà très impressionnants, et pourtant, ils ne sont rien en comparaison de ce qui nous attend sur Arrakis. Les étendues sableuses qui s'offrent à nous ne sont que poésie, tant et si bien qu'elles finissent par nous paraître réelles, presque familières, à la fin du film.
Denis Villeneuve à la réalisation dans Dune.
De la poussière et du sable s'élèvent des bâtiments sublimes, tout droit venus du futur. Paul Atréides parcourt ce nouveau monde et nous emmène avec lui. Fait intéressant, le montage fait très régulièrement des parallèles entre les visions de Paul et la réalité, et chaque scène parallèle semble avoir été taillée dans la roche, de façon à s'assembler parfaitement avec la précédente. Un travail d'orfèvre (avec notamment Joe Walker et Greig Faser aux commandes), qui nous offre un film d'une grande beauté. Mais que seraient ces séquences sans la participation de Hans Zimmer, qui fait un retour triomphal avec Dune ? Le compositeur nous offre en effet de nouvelles pépites, avec des compositions que vous pouvez d'ores et déjà découvrir sur YouTube, si le coeur vous en dit :
Un message écologique fort qui va de pair avec l'oeuvre de Herbert
Parmi les civilisations que l'on rencontre dans Dune, les Fremen sont un parfait exemple de société durable. On découvre une manière de "ne faire qu'un avec le désert", de vivre en adéquation avec une planète qui paraît hostile (et qui l'est réellement). Le désert, les vers de sable ... Tout est hostile à l'homme.
L'humain a ainsi dû s'adapter à la nature, et non l'inverse. L'économie de l'énergie et de l'eau est un axe primordial de l'oeuvre de Villeneuve, et cet aspect intéresse particulièrement Paul, qui aura pour volonté de comprendre Arrakis, et de réaliser la mission qui est la sienne (ou qu'il s'est fixée lui-même ? Libre à vous de l'interpréter). En cela, Denis Villeneuve respecte le message écologique fort qui se cache derrière le roman de Frank Herbert.
Notre conclusion
Dune est, comme notre titre l'indiquait, "Le Seigneur des Anneaux" de Villeneuve. Il s'agit d'un récit épique époustouflant, qui ne nous laisse aucun instant de répit. La longueur du film (2h35) nous a vraiment donné la sensation de contempler une fresque venue d'un autre univers, chose que nous n'avions pas ressentie depuis longtemps.
Peut-être vous souvenez-vous de la première fois que vous avez découvert une oeuvre marquante, comme celle de la trilogie du Seigneur des Anneaux par exemple ? Eh bien, découvrir Dune nous a laissé le même sentiment d'excitation. Nous ne pouvons que vous conseiller de le voir au cinéma afin de le découvrir de la meilleure façon possible, avec la musique de Hans Zimmer parfaitement dosée, qui vous fera, très certainement, voyager dans un autre univers. Nous ne pouvons qu'espérer que la deuxième partie prévue pour Dune verra bel et bien le jour à l'avenir.
Et si vous voulez en savoir davantage sur les précédentes adaptations de Dune et sur le roman de Frank Herbert, nous vous laissons consulter notre précédent dossier sur le sujet.
Je suis aussi curieux de voir à quel moment de l'intrigue il va terminer ce 1er film (en espérant que les suites seront validées par le studio).
Malheureusement, je ne pourrais pas le voir au cinéma, boycott de passe sanitaire oblige.
Vivement le Blu-ray du coup !
"Afin de respecter au mieux l'histoire du roman, le projet a été divisé en deux films. Par conséquent, le film Dune est une adaptation de la première partie du roman."
Villeneuve a par ailleurs déclaré il aimerait faire un troisième film sur le roman le "Messie de Dune" qui est la suite directe de Dune.
Si ce film est une réussite (au moins commerciale), on peut se mettre à espérer d'avoir une trilogie (et un jour peut être l'ensemble du cycle de Dune en film).
Non, le film « Dune » vit…
Enfin presque, disons plutôt « qu’il s’éveille à peine ». Comment faire sinon, avec un roman foisonnant, bourré de détails géopolitiques, philosophiques, écologiques etc..?
Au cinéma, medium d’images (et un peu de sons), traduire cela devrait se faire avec moins de bavardages et plus de « visions » incroyables. Ce que Jodorowski, et peut-être même Lynch (les rêves), n’ont pu conclure.
Si le credo régulier de la Warner est le « film à gros budget mais sérieux », on a donc à nouveau un bon produit, divisé en deux parties (comme lors de sa première publication dans le magazine Analog en 1963-1964)… Donc condensé de manière suffisante, mais dont les développements cruciaux sont reportés au prochain épisode (ou au pire, aux calendes grecques).
Quelques fans de l’œuvre seront contents d’y retrouver ce(ux) qu’ils connaissent.
Certains seront déçus de ne pas vraiment ressentir tout de suite l’ambiance particulière narrée dans le roman.
Porté par une flopée de stars talentueuses, le résultat est au final on ne peut plus Classique. C’est à dire que chacun y incarne avec évidence le personnage correspondant le plus à leurs habitudes d’acteurs.
Les beaux jeunes espoirs, les braves bourrus, les manipulateurs/trices, les méchants impitoyables… Pas de prise de risque, zéro contre-emplois. On pourra toutefois saluer un Jason Momoa plus chevaleresque que jamais.
Classique aussi son récit, concentré et sans digressions trop complexes, aux péripéties millimétrées tel un blockbuster d’Aventure et de Science-Fiction commun, nanti d’une toute aussi usitée histoire de Messie récalcitrant… mais qui se passerait trop entre bourgeois guerriers ennemis, le seul peuple modeste du film étant des autochtones – trop occupés à survivre.
Ça fait bel et bien partie du tout venant du genre, encore aujourd’hui, même pas assez violent et intello pour justifier une identité complètement Adulte.
Ainsi, avec toutefois une image bi-chromique (le Noir et Blanc auteuriste moderne, limite « publicitaire »), des scènes prenant un petit peu de temps de composer des symétries dans l’espace, ainsi que des plans d’ensemble bien beaux pour le grand écran et le plus possible « en dur »… Et surtout, ces équivalents de colons devisants avec des natifs/bédouins au milieu du désert…
C’est aux divertissements d’aventure, américains ou japonais (westerns et films de sabres), en Scope des années 60, que se réfère le plus ce film. Avec également une touche 80’s, par l’utilisation des synthés – « Blade Runner », encore ?
Et c’est très bien, c’est la même simplicité efficace.
Ça en fait l’un des meilleurs films de Denis Villeneuve, parce-qu’il semble plus y assumer sa part habituelle de naïveté… La même que celle de son héros, passant de manière très attendue à l’age adulte.
Linéaire mais pas trop, avec aussi un petit côté « jeu vidéo » – les progressions stratégiques, les boucliers qui donnent l’impression de voir les personnages « tilter » quand ils sont impactés etc…
Tout y est clair et net, comme l’assène même la toute dernière réplique (bateau) du film.
Voyons si par la suite, la somme des deux parties (ou plus) fera ressortir une identité encore plus originale et surréaliste pour cette nouvelle franchise – une de plus.
Ou si ça va devenir aussi cryptique que les suites de « Matrix ».