Avez-vous déjà entendu parler du scientifique Anatoli Bugorski ? Si la réponse est non, nous nous devons de vous raconter l'histoire passionnante de ce chercheur en physique, qui a réalisé une expérience hors du commun, et ce, bien malgré lui.
Le contexte historique
Nous sommes en pleine Guerre Froide, et l'Union Soviétique investit beaucoup dans le domaine de la recherche et de l'énergie nucléaire. À cette époque, dans le domaine de la recherche scientifique, nous savons déjà que lorsque deux protons entrent en collision dans un accélérateur de particules, ces derniers se transforment en muons, et en différentes autres particules.
En 1978 précisément, Anatoli Bugorski, un chercheur et physicien russe de 36 ans, observe une expérience au sein de l'accélérateur de particules le plus puissant de Russie. En voulant vérifier l'état d'une pièce de l'accélérateur qui avait mal fonctionné, le chercheur russe verra sa vie prendre un tout nouveau tournant.
L'accident de Anatoli Bugorski
M. Bugorski passe sa tête à l'endroit-même où le faisceau de protons était projeté au sein de l'accélérateur de particules, et ce, dans le but de vérifier l'état de la pièce défectueuse. Ce qu'il ignore, c'est que la machine, bien qu'elle semble en panne, fonctionne toujours, et que tous les mécanismes de sécurité sont tombés en panne. D'ordinaire, nous savons que 500 à 600 rads (Radiation Absorbed Dose, une ancienne unité de mesure de la dose de radiation absorbée par une cible) suffisent à tuer une personne. Or, le faisceau de protons (qui est entré au niveau du crâne de Bugorski, et qui est ressorti au niveau de son nez), mesurait quant à lui 200 000 rads en entrant, et en ressortant, en faisait 300 000.
Que s'est-il alors passé pour M. Bugorski ? Ce dernier n'a eu le temps de voir qu'un éclair aveuglant ("plus brillant que mille soleils" selon ses propres termes). Bugorski n'a ressenti aucune douleur. Il n'a d'ailleurs pas dit un mot concernant cet événement, et ce n'est que le lendemain qu'il a été emmené dans une clinique de Moscou, puisque le côté gauche de son visage avait beaucoup gonflé, au point d'être complètement tuméfié. Pour les médecins, Bugorski allait mourir dans les deux ou trois semaines qui allaient suivre.
Les conséquences de l'accident
Au cours des jours qui ont suivi l'accident, la peau du chercheur située à l'arrière de sa tête et sur son visage (jusqu'à côté de sa narine gauche) s'est détachée (laissant entrevoir le chemin qu'avait parcouru le fameux faisceau). L'intérieur de la tête du chercheur a aussi continué à se consumer, puisque tous les nerfs de la partie gauche de son crâne ont disparu en l'espace de deux ans. Oui, vous avez bien lu : le chercheur n'a pas succombé suite à cet incroyable accident. Malgré le fait que la partie gauche de son visage ait été paralysé, Bugorski a survécu, et mieux encore : il est resté un être humain au fonctionnement psychologique normal, pouvant même poursuivre des recherches scientifiques. Le chercheur a cependant connu quelques conséquences particulières suite à cette expérience.
Durant les douze premières années qui ont suivi l'accident, Bugorski faisait quelques crises d'ordre neurologique, mais rien de trop handicapant. Elles constituaient d'ailleurs les seules preuves neurologiques du fait que le chercheur avait vécu quelque chose d'unique au monde. En vieillissant, le côté droit du visage de Bugorski a pris de l'âge, alors que son côté gauche s'est totalement figé.
Même 19 ans après l'accident, le chercheur ne parviendra qu'à plisser la moitié de son front. Bugorski nota aussi une perte de l'audition du côté gauche.
L'accident tenu secret
Si l'histoire de Bugorski n'est pas aussi connue que l'on pourrait le penser, et bien qu'elle soit tout à fait exceptionnelle, c'est à cause du fait que tout ce qui touchait à l'énergie nucléaire durant la Guerre froide était tenu secret en Union soviétique. Le chercheur a ainsi dû respecter un délai d'une dizaine d'années (et la dislocation de l'URSS) avant de pouvoir parler ouvertement de ce qui lui était arrivé. Durant ce laps de temps, Bugorski se rendait deux fois par an, environ, dans une clinique de radiothérapie de Moscou, afin d'y être examiné, et d'échanger avec d'autres victimes d'accidents nucléaires.
De son côté, Bugorski se considère comme une heureuse exception. Depuis que son sort n'est plus secret, le chercheur cherche à se mettre à disposition des chercheurs occidentaux. Bugorski a toujours pensé qu'il pouvait être un brillant sujet d'études. Ce dernier a en effet affirmé, au cours d'une précédente déclaration :
Je suis, en fait, le résultat d'un test involontaire lié à la guerre des protons. La capacité humaine de survie a été mise à l'épreuve.
Bugorski est toujours en vie au moment où cet article est écrit, et a atteint l'âge honorable (notamment après un tel accident) de 78 ans. Et quant à vous, si vous souhaitez suivre la même voie scientifique et en apprendre davantage sur les accélérateurs de particules, vous pouvez consulter notre article concernant le boson de Higgs en pleine désintégration.
Par BegaLou, il y a 3 ans :
Super intéressant, je connaissais pas du tout, c'est vraiment une histoire qui mérite d'être davantage connue !
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