A mon époque... On jouait encore à Pokémon Go

Je pense m'attirer sans trop de problème les foudres d'une grosse communauté avec cette chronique, mais après tout, Internet sans troller, c'est comme un Salamèche sans flamme. Mais c'était à prévoir : après une expansion incontrôlable, le phénomène Pokémon Go s'est peu à peu essoufflé jusqu'à n'être représenté que par un très faible pourcentage de ses joueurs initiaux. Vous le savez comme moi, croissance éphémère et durée sur le long terme ne font pas bon ménage, et c'est Niantic qui en a fait les frais. Décryptons un peu cette époque où tout le monde était dingue de Pokémon Go... 

Le jeu de l'unanimité 

Dans ma vie, je ne pense pas avoir connu un autre jeu mobile qui a su faire l'unanimité aussi rapidement qu'a pu le faire Pokémon Go. Mêlant nostalgie et petite révolution technologique par l'interactivité avec le monde extérieur, le jeu développé par Niantic sous la tutelle du géant japonais des jeux vidéo Nintendo s'est étendu de manière planétaire dans un laps de temps record. En France pourtant, le démarrage avait été victime d'un faux départ. En effet, une grande partie des joueurs s'était déjà procurée le jeu avant même sa sortie officielle causant un problème de taille : ceux qui ont dû attendre pour des raisons techniques la version officielle ont pris un retard insupportable sur les autres.

Enfin bref, retard ou non, le constat est simple : l'application est téléchargée sur 90% des smartphones des moins de 35 ans (données non officielles, issues de ma logique personnelle). Pokémon a tellement marqué une génération (en particulier les premières versions Rouge, Bleu et Jaune) que chaque dresseur dans l'âme a rêvé un jour de pouvoir monter sa véritable équipe. Pokémon Go donnait enfin une solution à ce rêve : pouvoir attraper des Pokémons dans des milieux naturels à l'aide d'une application. Les joueurs prennent plaisir à (re)découvrir la ville dans laquelle ils vivent depuis 20 ans, en parcourant les moindres rues à la recherche de Pokémon rare. 

Une belle révolution 

Le succès de Pokémon Go, c'est avant tout de "casser" les codes d'un jeu vidéo lambda. Quand on dit "jeu vidéo", dans la culture populaire (et non pas dans la mienne, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit), on pense à un joueur joufflu confiné dans sa chambre. Mais ici, les codes vont être inversés : pour progresser on doit non seulement sortir de chez soi, mais aussi se promener et marcher le plus longtemps possible. Ainsi, les parcs publics se remplissent de dresseurs avides de Pokémons, équipés de batteries portatives. 

D'un point de vue technologique, Pokémon Go a aussi fait très fort. Il permet une interactivité directe avec le monde réel, ce qui est étroitement lié au fait de sortir de chez soi notamment. Les Pokémons se trouvent dans les rues, un peu partout, mais à des endroits précis. Il est donc nécessaire de se rendre à ce point fixe pour capturer le Pokémon en question. Le jeu smartphone prend ainsi une dimension très "familiale" : y jouer seul n'apporte que très peu d'intérêt, c'est sortir "chasser" avec ses amis qui rend le jeu si cool. On progresse conjointement et on se jalouse entre nous avec nos différentes prises. 

Puis l'essoufflement 

Et enfin, comme cela avait été facilement pressenti, le "buzz" Pokémon Go s'est trop vite évaporé. La ferveur aura tenu tout de même deux bons mois, mais a été anéanti par, à mon sens, plusieurs vecteurs préjudiciables. Le premier, c'est la rentrée, tout simplement, qui se compose sous deux formes. D'abord la fin des vacances et la reprise du boulot qui a vidé les rues la journée et démotivé les dresseurs sortant du travail à aller chasser le soir. C'est tout à fait logique : on ne peut pas jouer que quelques minutes par jour à Pokémon Go, pour progresser il est nécessaire de s'impliquer au maximum. La fin des vacances est aussi étroitement corrélée au beau temps qui s'estompe, là aussi autre facteur de démotivation chez les dresseurs.

D'autre part, et c'est de mon côté ce qui m'a fait arrêter, la difficulté de Niantic à nous tenir en haleine. A sa sortie, des rumeurs se dissimulaient comme quoi le jeu n'en était qu'à 10% de ses capacités ce qui faisait baver tout le monde. 4 mois après, on en est à combien ? 20% ? 25% si on est gentil ? Tous les dresseurs se le disaient depuis le début : il va falloir de grosses évolutions régulières pour garder les utilisateurs accrochés à l'application, sans ça il se passera ce qu'il s'est passé : l'effet monotone du jeu vidéo. 

Plusieurs promesses avaient pourtant été mises en avant. La première, c'était la possibilité des échanges et des combats entre dresseurs. Un dernier point ultra important pour que les dresseurs puissent se comparer les uns aux autres sans passer forcément par les arènes, ce qui n'a pas été fait. L'autre, c'était évidemment l'ajout des prochaines générations. Aujourd'hui, la plupart des joueurs encore présents sur le jeu ont terminé le pokédex, alors comment les maintenir ?

Pour terminer et ouvrir un petit peu sur le sujet, je débrieferai sur deux points. Le premier, c'est que les fans éphémères de Pokémon ont délaissé le jeu, le laissant intégralement dans les mains des fans de la première heure, ce qui dans un sens, est une bonne chose. D'autre part, je suis prêt à parier une très grosse somme que dès l'ajout de la 2G, Pokémon Go va redevenir un buzz phénoménal puisque Niantic sait forcément qu'il va falloir mettre les bouchées doubles, tant dans le fond, que dans la forme. Cette histoire est donc loin d'être terminée.