Essayez d'expliquer à vos grands-parents, parfois même vos parents, en quoi consiste le métier de Youtubeur. "Des personnes qui réalisent des vidéos, puis les postent sur Internet. Et grâce à leur succès et leur originalité, arrivent à en vivre". Le concept semble complètement dingue. Et pourtant, aujourd'hui, on peine à se souvenir de la vie pré-internet, et au-delà de ça, de la vie pré-Youtube. Cependant, en quelques années, nos stars françaises de la gigantesque plateforme ont peu à peu changé, les sketchs et l'humour se laissant supplantés par des vidéos informatives ou culturelles. Revenons avec précision sur ce basculement caractéristique de notre société 2.0.
Le bon coche
Ce bon coche, c'est au début de la décennie 2010 qu'il a fallu l'avoir, dans un laps de temps très déterminé. Alors que Youtube et Dailymotion se partagent les coups pour la plateforme la plus ergonomique, certains voient à travers cette guérilla le moyen de se lancer dans un concept des plus novateurs : le podcast. Bien évidemment, ceux-ci s'inspirent eux-mêmes d'une lente progression sur le média : avant eux certains ont partagé leur passion sur Youtube, les jeux-vidéos notamment, ou d'autres ont réalisé de courts sketchs aux budgets restreints, mais cette nouvelle mode enflamme.
L'objectif est simple : se filmer face caméra, puis, autour d'un thème précis, réaliser un sketch court et construit. En France, principalement trois Youtubeurs ont été les pionniers du domaine : Norman, Cyprien et Mister V, très vite rejoint par une flopée d'opportunistes cherchant à surfer sur la vague médiatique qu'entraînent les podcasts. Et le concept marche, il marche même tellement bien que ces néo-youtubeurs en font leur métier, et vivent d'une passion originale et impensable. Mais, impossible n'est pas Internet me direz-vous.
La surmédiatisation
Mais si ces nouveaux noms de l'humour français ont pu profiter un long temps d'un procédé qu'ils ont contribué à démocratiser, les nouveaux arrivés sur la plateforme au "y" rouge ont dû redoubler de force pour se faire un nom. Et à l'époque, le maître mot de la réussite sur Youtube, c'est faire rire. Se créent alors de nombreux concepts face-caméra, pas toujours considérés comme des podcasts, mais pourtant toujours sous le signe de l'humour. Ainsi, What The Cut, Joueur du Grenier ou Salut Les Geeks détournent l'idée à leur sauce en lui apportant une dimension supplémentaire et agréable.
En revanche, d'année en année, impossible de se renouveler éperdument autour de ce simple concept, et même de celui plus généraliste qu'est l'humour. Ainsi, la nouvelle génération de vidéastes semble avoir saturé l'entrée dans le réseau des nouveaux, et de ce fait, les nouveaux Youtubeurs ont du se porter sur d'autres sujets, car l'immense fan-base construite à travers ces podcasts s'est peu à peu lassé.
Des moyens colossaux
Si Youtube s'est révélé comme un média indépendant, l'émergence de cette nouvelle catégorie d'humoristes est entrée dans un cercle vicieux. En effet, les premiers arrivés ont jouit d'un grand succès leur permettant d'augmenter considérablement leurs moyens pour les vidéos, bloquant ainsi l'accessibilité de nouveaux youtubeurs aux idées drôles et intéressantes, mais beaucoup plus amateurs. Le podcast s'est tellement démocratisé qu'il en est même devenu un art à part entière où être doué en montage vidéo n'est plus le seul ingrédient susceptible de répondre aux attentes des internautes.
Au-delà de ça, le public est éternellement insatisfait : quand SLG ou WTC redouble d'efforts pour créer des épisodes aux moyens et aux idées dantesques, Cyprien ou Mister V se concentrent sur d'autres centres d'intérêts, notamment les longs métrages.
Puis est arrivée la culture
Venons en (enfin) à notre conclusion : les vidéos culturelles. Si je considère LinksTheSun comme le pionnier de ce concept en France avec son Point Culture, ce-dernier conserve une part d'humour et d'ironie, parfois même de détournement. Mais aujourd'hui, de nombreuses chaînes débarquent sans aucun trait humoristique, simplement de l'information mêlée à un lourd effort de montage vidéo et de traitement. Youtube, contrairement aux autres reportages informatifs (cf. Arte) propose des formats courts et concis, traités avec beaucoup plus de légèreté. Aussi, il permet de s'intéresser directement aux sujets auxquels on se sent concerné : le cinéma, la musique, les mystères etc.
Par son omniprésence dans le quotidien, Youtube est un art qui se doit un renouvellement perpétuel à travers ceux qui tissent sa toile, à savoir, ses youtubeurs. Ceux-ci profitant du "meilleur métier du monde" ont pourtant vite fait de tomber dans l'oubli avec des vidéos redondantes et sans grande considération. L'humour, considérablement installé grâce à des budgets de plus en plus importants est devenu quasi inaccessible, et c'est ainsi que nos youtubeurs "culturels" aux vidéos nécessitants moins de budget, ont pu, et continuent à s'imposer.
Par jeanLucasec, il y a 8 ans :
résumé pertinent
Répondre à ce commentaire
5
1