Sciences : le cœur de la Terre fuit, et c'est très sérieux
Si la formule peut paraître simpliste, elle illustre pourtant bien ce qui se trame sous nos pieds : le coeur de la Terre fuit. Explications, alors qu'une sérieuse étude vient d'être menée à l'autre bout du monde.
Le noyau de la Terre, un véritable boîte noire
Régulièrement, dans nos colonnes, nous vous faisons part de certaines découvertes et études des chercheurs afin de comprendre le fonctionnement de notre bonne vieille planète. Nous vous expliquions par exemple que six des neuf "limites planétaires" avaient été atteintes cette année, ou que le noyau au centre de la Terre se serait arrêté de tourner d'ouest en est depuis 2009, concept appelé effet de "balançoire".
Une théorie de plus qui prouve que le noyau de la Terre recèle encore bien des secrets. Plus récemment, des scientifiques ont découvert une concentration sans précédent d'un isotope rare de l'hélium dans les anciennes coulées de lave de l'île de Baffin, au Canada.
"Nous avons également dû déployer un hélicoptère pour y accéder"
Plus précisément, cette substance très rare, l'hélium-3, un isotope de l'hélium rare et prisé, fuit lentement du cœur de notre planète vers le manteau terrestre. C'est l'exploit qu'ont réussi Forrest Horton, géochimiste à la Woods Hole Oceanographic Institution, et son équipe de chercheurs. Selon une étude publiée mercredi 18 octobre 2023 dans Nature, les chercheurs ont découvert une quantité encore jamais observée d'hélium-3 (3He), dans les anciennes coulées de lave de ces roches arctiques toujours aussi mystérieuses et primordiales dans la compréhension de notre planète.
Nous avons travaillé avec des organisations locales et le Service des parcs nationaux du Canada, qui ont tous deux apporté un soutien essentiel. Nous avons également dû déployer un hélicoptère pour y accéder", déclare Forrest Horton, dans un article de Vice.
D'autre part, les scientifiques ont également observé la présence d'hélium-4 (4He), un autre isotope qui n’avait encore jamais été mis au jour dans les roches volcaniques terrestres. "Ce qui était surprenant, c'est que nous avons mesuré des ratios 3He/4He qui s'étendent à des valeurs beaucoup plus élevées qu'on ne le pensait auparavant", réagit le chercheur. Plusieurs études démontrent que l'hélium-3 était présent en masse à l’époque de la formation de la Terre, il y a 4,6 milliards d’années, avant d’être progressivement emprisonné dans les profondeurs de la planète.
Des informations inédites sur le fonctionnement de la Terre
Étant un élément extrêmement léger et volatile, cet isotope aurait déjà dû s'échapper de son noyau, il y a près de 5 milliards d'années. Dès lors, lorsque les géologues en retrouvent des traces dans des dépôts de roche volcanique, leur principale hypothèse renvoie à une fuite récente et massive du noyau terrestre. Mais davantage, ils avancent qu'il s'agit là du ratio le plus important jamais mesuré dans une roche terrestre.
Alors, qu'est-ce que cela nous apprend-il concrètement ? Cette étude pourrait nous permettre d'apprendre des informations tout simplement inédites sur la formation de la Terre. "Cela suggère que la Terre profonde est plus dynamique que nous ne le pensions : les éléments se déplacent entre les parties métalliques et rocheuses de notre planète", s'épanouit Forrest Horton, avant de poursuivre : "notre étude peut contribuer à notre compréhension des origines de l'hélium 3 sur Terre. À bien des égards, elle soulève plus de questions qu'elle n'en résout."