Westworld : les audiences de la saison 3 déçoivent. Explications !
Lorsque était parue sa première en 2016, Westworld était régulièrement appelé "le nouveau Game of Thrones de HBO". Traduction : la série SF de Jonathan Nolan et Lisa Joy devait devenir un phénomène mondial. Nous sommes en 2020, et HBO sort le quatrième épisode de la troisième saison de Westworld. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que les audiences déçoivent. Comment expliquer ce phénomène ?
Une impressionnante baisse des audiences
La troisième saison de Westworld a débuté sur HBO le 15 mars 2020 (et le 16 mars 2020 en France sur OCS), au rythme d'un épisode par semaine. Pourtant, les spectateurs américains, qui regardent les séries en direct sur HBO, semblent s'être désintéressés de la série SF de Jonathan Nolan et Lisa Joy. Lors du premier épisode de la saison 2, diffusé le 22 avril 2018, HBO avait enregistré un taux d'audience de 2 060 000 de spectateurs en direct, la série atteignant alors un de ses plus hauts scores d'audience. Pour le premier épisode de la saison 3, HBO a enregistré un taux d'audience d'à peine 900 000 spectateurs. Soit une baisse de 57% de son audimat. Le second épisode de la saison 3, ne fait pas mieux, avec une audience de 780 000 spectateurs, contre 1 850 000 lors du second épisode de la saison 2, soit, une baisse de 58% (et de 14% entre le premier épisode et le second épisode de la saison 3). L'épisode 3 de la saison 3 connait une très faible poussée, avec une baisse de 51% si on le compare avec les audiences de l'épisode 3 de la saison 2, et une hausse de 2,5% entre l'épisode 2 et l'épisode 3.
Attention toutefois, il est important de nuancer ces chiffres. Tout d'abord, rappelons qu'ils représentent uniquement les audiences des spectateurs ayant regardé les épisodes en direct. Les audiences des spectateurs regardant la série sur les SVOD font augmenter de manière significative les chiffres d'audience, avec une moyenne de 1,7 million de spectateurs par épisode.
Ensuite, Westworld est actuellement la série HBO la plus regardée sur les services de streaming du groupe Warner, devant des séries ayant eu un accueil dithyrambique de la critique et du public : Watchmen, le dernier chef d'oeuvre de Damon Lindelof (The Leftovers), qui offrait une continuité brillante à l'oeuvre légendaire d'Alan Moore et Dave Gibbons, et qui avait rassemblé en moyenne 758 000 téléspectateurs en direct (1 427 000 si l'on compte les streaming) ; et The Outsider, dans laquelle Richard Price (The Night Of) nous livrait l'une des meilleures adaptations d'un roman de Stephen King, et qui avait cumulé une moyenne de 914 000 spectateurs (1 455 000 en prenant en comptant les visionnages sur SVOD). Rappelons par ailleurs que Watchmen faisait partie de nos coups de coeur de l'année 2020, et que The Outsider fait partie des nouvelles séries que nous vous recommandons absolument de voir pendant le confinement. Cependant, là encore, il faut nuancer : le budget alloué à la saison 3 de Westworld n'est pas le même que ceux alloués à Watchmen et The Outsider, qui, rappelons-le, sont des mini-séries (même si Richard Price commence à parler d'une éventuelle saison 2 pour The Outsider).
Explications de cette baisse d'audience
Il est intéressant, du coup, de s'interroger sur les raisons de cette extraordinaire baisse d'audience de l'une des séries phares de HBO. Avant d'aller plus loin, l'auteur de ces lignes se doit d'être honnête avec vous, très chers lecteurs : Westworld est une de ses séries préférées, et il est un des plus ardents défenseurs de la saison 2.
Westworld n'a pas attendu le démarrage de sa troisième saison pour voir ses audiences dégringoler. Alors que sa première saison avait bénéficié d'un audimat sans cesse plus grand (avec une augmentation de 18,3% de téléspectateurs entre le premier et le dernier épisode de la saison), la saison 2 avait vu son audimat diminuer, avec une baisse de 24.3% entre le premier et le dernier épisode. La raison de cette chute des audiences lors de la saison 2 est assez intuitive : la série de Jonathan Nolan et Lisa Joy est extrêmement exigeante, une série profondément cryptique, trop pour certains spectateurs. Alternant entre symbolisme métaphysique, concepts philosophiques d'avant-garde, paradoxes temporels (peut-être plus artificiels, il est vrai, qu'en première saison) et simulations que n'aurait pas renier le philosophe français Baudrillard (qui a inspiré aux Wachowsky la saga Matrix), la saison 2 a laissé sur le carreau nombre de ses spectateurs, tandis que d'autres (dont votre serviteur !) ont crié au génie !
Un autre facteur, inhérent cette fois à la production de la série, a joué à la défaveur de Westworld. En effet, les saisons de cette série de SF ont un temps de production extrêmement lent, avec un rythme de parution de deux ans entre les saisons (2016 pour la saison 1, 2018 pour la saison 2, 2020 pour la saison 3). Mais est-ce que cette production finalement assez lente, du point de vue des normes actuelles, est véritablement en adéquation avec cette époque de binge-watching, où les séries se consomment comme un repas dans un fast-food, aussitôt consommée, aussitôt jetée ?
Le calendrier a également joué à la défaveur de la saison 3 de Westworld. Tout d'abord, la série de HBO sort chaque dimanche soir, en même temps que The Walking Dead d'AMC. Si la série de Robert Kirkman a connu un long passage à vide pendant plusieurs saisons, force est de constater que la saison 10 semble avoir réconcilié la série avec une partie de ses admirateurs. D'autant que le climat post-apocalyptique de la célèbre série de zombies trouve un écho sinistre en ces jours troublés, conférant à The Walking Dead une aura électrisante.
Autre problème : la pandémie de CoVid-19 qui bouleverse notre monde bouleverse également nos habitudes. Si les géants du SVOD (Netflix, Prime Video, Disney+) ont su tirer leur épingle du jeu, du fait du confinement, ce n'est pas le cas des chaînes câblées. Les téléspectateurs qui allument leur télévision pour autre chose que Netflix & co, l'allument bien souvent pour regarder les informations. Sans compter également l'actualité politique brûlante américaine, avec le débat démocrate, opposant Bernie Sanders à Joe Biden, sur CNN, le dimanche... en même temps que Westworld.
Faut-il craindre une annulation de la série ?
Etant donnés les faibles scores de la saison 3 de Westworld, la question d'une annulation de la série se pose en effet. Cependant, les fans ont de quoi se rassurer. S'il est arrivé à HBO d'annuler des séries (on se souvient par exemple de l'annulation de l'excellente Vinyl de Martin Scorsese et Terence Winter, annulée après une saison), la chaîne a une politique beaucoup plus en faveur des artistes que d'autres chaînes concurrentes. Le meilleur exemple est bien évidemment David Simon, showrunner légendaire qui a fait les grandes heures de HBO, avec The Wire, qui pourtant était loin, très loin, de faire des records d'audiences. Malgré le peu d'audiences que faisait la série, aujourd'hui considérée comme l'une des plus grandes séries jamais réalisées, HBO a permis à David Simon d'aller jusqu'à la saison 5, et a produit et distribué tous ses projets suivants, de Treme à The Plot Against America (mini-série adaptant le chef d'oeuvre de Philip Roth, actuellement en diffusion, et qui fait également partie de nos recommandations pendant le confinement), en passant par Show Me A Hero et The Deuce.
Par ailleurs, si l'on sait que cinq saisons de Westworld sont actuellement prévues, certaines sources évoquent le fait qu'une quatrième saison serait d'ors et déjà dans les tuyaux de HBO, bien que la chaîne ne l'ait pas officiellement déclaré. On ne sait cependant si la chaîne demandera à Jonathan Nolan et Lisa Joy de terminer leur histoire en une saison.
Pour ceux qui hésiteraient à regarder la saison 3 de Westworld, nous vous la recommandons avec fermeté. Déjà parce qu'elle saura réconcilier, nous en sommes certains, ceux qui ont abandonné la série en cours (ou à la fin de la) saison 2. La série devient moins cryptique, affronte son sujet de manière plus directe. Par ailleurs, dans cette saison 3, Jonathan Nolan et Lisa Joy parviennent à tisser un univers de cyberpunk aussi passionnante que Ghost in the Shell de Masamune Shirow ou que Les Androïdes rêvent-ils de moutons électriques de Philip K. Dick, avec une esthétique qui n'a rien à envier aux plus beaux plans de Blade Runner 2049 de Denis Villeneuve, et un discours politique sur les Big Data que n'aurait pas renié Alain Damasio. Le tout magnifié par une musique toujours aussi extraordinairement belle de Ramin Djawadi, dont voici un extrait, sorti ce jour sur toutes les plateformes de musiques.
"une quatrième saison serait d'ors et déjà dans les tuyaux de HBO,"
"et simulations que n'aurait pas renier le philosophe français"
Je m'explique. Il y'a plein de bonnes idées, une ambiance intéressante avec de supers décors, des personnages dans l'ensemble bien écrits... Malheureusement, la surenchère de violence les enjeux simplistes et le personnage caricatural de Dolores viennent tout gâcher. La série ne va nul part et c'est triste car elle avait tout pour elle.
Cette saison va échouer pour les mêmes raisons que la précédente dont les meilleurs épisodes pour les critiques étaient ceux sans Dolores (celui avec l'indien qui racontait son aventure...).
Cette saison pourrait bien dépasser les autres en terme de script mais surtout d’images et de jeu d’acteur.
Comme l’auteur de ce texte, je suis complètement époustouflée par les épisodes et le scénario. Du pur génie.