Star Wars, l’héritage d’une génération

2005. Le troisième volet de la saga Star Wars (qui est en fait le sixième, on n’a évidemment pas besoin de vous faire un dessin), La Revanche de Sith, vient refermer la seconde trilogie. Les fans, en larmes, s’imaginent le pire : était-ce la dernière fois que la délicieuse lumière bleue d’un sabre laser venait illuminer les salles obscures ? Bon, évidemment que non, et tout le monde s’en doutait bien un petit peu. Les Jedi reviendront plus forts, plus beaux, d’ici quelques années. Mais comme entre les deux premières trilogies, les années s’enchaînent, les enfants grandissent et alors que le huitième volet de la saga pointe le bout de son nez, le flambeau passe d’une génération à une autre.

Star Wars, une saga héréditaire

Certaines sagas marquent une époque, d’autres marquent le cinéma. La trilogie Retour vers le futur par exemple, et bien qu’énorme référence cinématographique, reste finalement cantonnée à ces années 1980, début des années ’90. En ce qui concerne Star Wars, la saga ne cesse de se renouveler depuis 1977, date de la sortie de l’épisode IV : Un nouvel espoir. A partir de là et pendant trente ans, l’œuvre de George Lucas n’a cessé de dompter le septième art, à travers deux trilogies emblématiques. En moyenne, de 1977 à 2005, un épisode sort tous les cinq ans.

Ainsi, un enfant de 10 ans qui aurait découvert les Jedi en 1977 ne connaîtrait le dénouement de la seconde trilogie qu’à 38 ans. La beauté du cinéma, c’est que ce même homme de 38 ans a pu entre-temps avoir un enfant qui, en 2005, aurait une dizaine d’années, et qui accompagnerait son père au cinéma pour la conclusion de la saga. Ce même enfant qui, dix ans plus tard, alors âgé de 20 ans, se rendra au cinéma avec son père, proche de la cinquantaine, pour entamer une nouvelle trilogie palpitante. Oui, la folie Star Wars est bel et bien héréditaire. 

Le Jedi aux oreilles de Mickey

Néanmoins entre le sixième et le septième film, un épisode inattendu est venu rythmer la folle campagne de Star Wars. Mickey, qui se préparait depuis des années au combat, s’est muni à son tour d’un sabre laser pour venir défier George Lucas et sa société de production Lucasfilm. Ainsi, en 2012, Disney rachète le monde des Jedi pour 4 milliards de dollars et annonce dans le même coup ses ambitions pour les prochaines années : un film autour de l’univers tous les 2 à 3 ans.

Les fans tremblent d’impatience, mais aussi de peur, inquiets que la nouvelle association entre les deux colosses du cinéma ne rime qu’à une triste histoire de billets. Le 16 décembre 2015, la Force se réveille sous la tutelle de J.J. Abrams. Les premières impressions sont bonnes, voire très bonnes, mais sont peut-être empruntes de l’immense hype qui entoure le film. Avec deux années de recul désormais, les critiques sont bien plus nuancées, et force est de constater que ce septième épisode n’occupe pas forcément une place de choix dans le cœur de la communauté. Et Mickey semble y jouer un rôle.

A l’occasion d’un sondage où le panel était invité à choisir son épisode préféré, il a été relevé que le plus récent est le moins populaire chez les plus de 25 ans, avec seulement 3% des voix. Red, l’un d’eux,  explique ce chiffre : "Ce n’est pas Star Wars, c’est la pompe à fric à Disney. La totalité du film reste du recyclé de l’épisode IV. Y’en a marre qu’on nous resserve la même chose avec un nom différent à chaque décennie".  Yann, un autre fan, le rejoint : "C’est simplement le 4 en HD". Une critique, par ailleurs récurrente mais qui pourrait sembler cohérente : et si Disney n’avait pas simplement voulu réunir à nouveau le cocktail de l’épisode 4 pour entamer sa nouvelle trilogie ?

(L’autre) Retour du Jedi

En évoquant cette hypothèse, on en vient à en dessiner une autre : et si, tout simplement, l’épisode 7 n’était pas destiné à cette catégorie d’âge ? Personnages liftés, plus proches du héros Disney que du "véritable" Jedi et un univers sûrement plus léger : Le Réveil de la Force se place comme le Star Wars d’une nouvelle génération. En témoigne les réponses des moins de 18 ans sur le même sondage qui considèrent à 8% ce septième épisode comme leur préféré, en quatrième position. Cette même communauté, moins âgée, qui se montre bien plus tempérée vis-à-vis du film. Certains suggèrent d’attendre le reste de la trilogie, précisant que juger un Star Wars intrinsèquement ne valait pas grand-chose, même si le débat autour de Kylo Ren persiste.

Et si les moins de 18 ans sondés l’ont été sur les réseaux sociaux, le pourcentage du Réveil de la Force pourrait être sensiblement plus élevé s’il comprenait les moins de 15 ans et ceux qui n’ont pu participer au sondage. Car pour eux, âgés seulement d’une petite dizaine d’années, il s’agit là d’un des tous meilleurs films, tout court. Englué dans une nouvelle hype Star Wars, porté par Disney qui placarde ses boutiques et ses parcs d’attractions de produits dérivés de la saga, les sabres laser sont complètement redevenus au goût du jour. De quoi sérieusement se demander si Mickey n’avait pas prévu son coup, car il sait très bien, lui-aussi, que l’amour que l’on porte à un film est très étroitement lié à sa valeur nostalgique. N’en déplaise aux plus vieux…