Japon : après 56 ans, cet anime plus vieux que Les Simpson devrait s'arrêter
Le monde de l'animation japonaise est en ébullition après un scandale majeur qui a ébranlé Fuji Television. La plus ancienne série animée en cours de diffusion se retrouve en danger. Cet animé est l’un des plus grands classiques du genre et fait partie intégrante de la pop culture japonaise. Diffusée sans interruption depuis 1969, cette série culte, considérée comme un véritable pilier de la culture japonaise, se retrouve aujourd'hui sans sponsors et, selon toute vraisemblance, sans grande chance de pouvoir se poursuivre.
Un scandale qui pourrait mettre fin au plus grand diffuseur japonais
Tout a commencé en décembre dernier, lorsque le tabloïd Josei Seven a révélé une affaire de harcèlement sexuel impliquant Masahiro Nakai, animateur emblématique de Fuji TV. Selon les accusations, Nakai aurait agressé une femme lors d'un dîner privé. L'affaire, d'abord minimisée, a pris une ampleur considérable lorsque plusieurs entreprises partenaires de la chaîne ont décidé de couper les ponts avec la prestigieuse chaîne nippone.
En janvier, les dommages sur le groupe se sont intensifiés. Nissan, Procter & Gamble, Daiwa House et même Nintendo ont progressivement retiré leurs spots publicitaires, mettant en danger le programme familial Sazae-san. Cette série culte, diffusée depuis 1969, est désormais sans sponsor. Le 2 février, Fuji TV a officiellement supprimé les annonces de marques qui étaient présentes à la fin de chaque épisode. Désormais, la diffusion de la série est suivie par une simple mais étonnante image du chat de la famille, Tama, errant devant la maison.
Un morceau du patrimoine culturel japonais en sursis
Sazae-san est bien plus qu'une simple série animée. Adaptée d'un manga de Machiko Hasegawa publié pour la première fois en 1946, la série dépeint la vie quotidienne d'une famille japonaise traditionnelle dans un contexte post-Seconde Guerre mondiale. Son succès est tel qu'elle est entrée en 2004 dans le Livre Guinness des records en tant que "série animée encore en cours la plus longue du monde". Depuis plusieurs décennies, la série est au cœur de nombreuses adaptations, dont une en live action, ainsi qu'un important merchandising.
L'absence de sponsors pourrait signifier la mort imminente de ce monument de la télévision nippone. Sans financement, Fuji TV pourrait être contrainte de mettre un terme à la diffusion, une décision qui marquerait la fin d'une époque pour l'animation japonaise.
Un effet domino sur d'autres animés emblématiques
Sazae-san n'est pas la seule victime collatérale du scandale. Chibi Maruko-chan, autre série culte diffusée depuis 1995, a elle aussi perdu ses sponsors et voit son avenir compromis. Cette série raconte les aventures d'une petite fille espiègle, souvent comparée à des titres américains comme Denis la Malice ou Malcolm pour son caractère résolument farceur. Comme Sazae-san, elle est ancrée dans la culture populaire japonaise depuis des décennies, et son arrêt marquerait une rupture importante dans l'histoire de l'animation.
Une réaction sur toute la production japonaise
Alors que Kenji Shimizu, nouveau président de Fuji TV et ancien producteur de Dragon Ball Z et Dr. Slump, tente de redresser la situation, l'avenir de Sazae-san demeure incertain. La chaîne a annoncé une enquête interne confiée à un comité indépendant, mais rien ne garantit que cela suffira à regagner la confiance des sponsors. D’autant, que cette affaire intervient moins d'un an après un autre scandale d'envergure, celui de Johnny Kitagawa, fondateur de l'agence Johnny & Associates, accusé d'abus sexuels systématiques. Ce scandale avait déjà mis en lumière les problèmes de transparence et de responsabilité dans l'industrie du divertissement japonais.
Avec la chute de Sazae-san, la pression s'accentue sur l'industrie de l'animation et des médias au Japon. La population demande plus de transparence et de responsabilité de la part des grandes chaînes et des producteurs. Le classement du Japon à la 118áµ place sur 146 pays dans le Global Gender Gap Report de 2024 souligne une problématique plus large concernant les inégalités de genre et les abus de pouvoir.
Les fans, quant à eux, sont partagés. Certains espèrent que la série trouvera un moyen de survivre, peut-être en passant à un modèle de financement différent, tandis que d'autres acceptent que cette institution télévisuelle touche à sa fin. Quoi qu'il en soit, cette affaire montre à quel point la société japonaise est en pleine mutation et que les anciennes institutions ne sont plus intouchables face à l'exigence croissante de responsabilité et de transparence imposée par ces scandales.