Quand on pense "pirate", on pense souvent à de la franche camaraderie un peu sexiste et au pire, à des êtres sanguinaires et barbares qui n'ont aucune pitié pour leurs adversaires ou pour les plus faibles qu'eux. En vérité, il s'agit d'une série de clichés popularisés par la Pop-Culture. En réalité, l'historiographie de la piraterie est très récente puisque les recherches de référence en la matière ont véritablement commencé dans les années 1970.
Ces recherches ont notamment permis de montrer que les pirates étaient en réalité beaucoup plus ouverts et tolérants que la plupart des films et récits de piraterie le laissaient penser. Nous vous proposons de découvrir ces facettes méconnues à travers 10 exemples qui le prouvent.
#1 : L'ouverture des rangs aux pirates noirs
L'époque de la piraterie était malheureusement propre à celle de l'esclavagisme, également. Dans les Caraïbes, les îles appartenaient aux colons espagnols et les populations d'esclaves se multipliaient à vitesse grand V. Cela dit, beaucoup d'exemples prouvent que les pirates acceptaient volontiers des nouveaux membres d'équipage, quelle que soit leur couleur de peau.
Cet aspect est méconnu, pourtant, on sait aujourd'hui que certains équipages comptait une grande partie d'anciens esclaves parmi ses effectifs, allant du tiers jusqu'à la majorité des membres. Il s'agissait principalement d'anciens esclaves ayant réussi à s'enfuir des plantations ou bien des habitants de l'île d'Eleutheria, dans les Bahamas, qui se sont érigés en terre d'accueil pour les esclaves révoltés, pendant un temps. Malgré tout, des stéréotypes subsistaient et de nombreux pirates noirs ont été effacés des récits de piraterie de l'époque, en raison de leur couleur de peau.
#2 : Les pirates étaient de fervents partisans démocrates
L'historien Cristopher Hill, également professeur de renommée mondiale à Oxford, divise les pirates en deux catégories : ceux qui rejetaient l'Église anglicane en prônant la liberté religieuse et ceux qui se faisaient défenseurs de la démocratie dans le sillon de la révolution anglaise.
En effet, la plupart des pirates du XVIIe siècle étaient beaucoup plus libertaires et justes que ce que l'on imagine. Loin du cliché du pirate sans foi ni loi qui affirmait sa puissance à travers la violence, les pirates avaient tendance à élire le capitaine et le quartier-maître (chargé de l'ordre au sein du navire) par le biais d'un vote démocratique. Ils devaient également partager équitablement les ressources entre chaque pirate.
Par ailleurs, ce n'est pas parce que le rôle de capitaine incombait à un seul homme qu'il était le seul à prendre des décisions. Ainsi, le fameux capitaine Bartholomew Roberts donnait le droit de vote aux pirates afin de décider des résolutions à adopter au fil de l'eau.
#3 : Les pirates prônaient la laïcité et le respect des religions
Comme indiqué dans le point précédent, les pirates dits "radicaux" avaient la particularité de s'opposer à l'oppression de l'église anglicane et respectaient, par la même, la pratique des autres religions.
Beaucoup de pirates étaient des huguenots, une branche protestante qui a été persécutée à travers plusieurs pays d'Europe du XVIIe au XVIIIe siècle. La tolérance était donc une notion phare de la vie en mer pour de nombreux pirates. Cela a atteint un tel point qu'il existe des récits (dont on ignore encore s'il s'agit de légendes ou de faits avérés) d'une colonie utopique fondée par le pirate huguenot Misson. Celle-ci prônait notamment la tolérance religieuse.
Elle aurait existé 25 ans sur l'île de Madagascar à la fin du XVIIe siècle et aurait consisté en une communauté prônant la liberté au sens social et économique du terme, sans esclavage, où l'opinion de chacun est respectée. Bien que l'existence de cette utopie ait aujourd'hui été remise en cause, elle a été reprise bien des siècles plus tard par les idées des Lumières.
D'autres utopies dont la véracité a, cette fois, été historiquement prouvée ont existé. Comme la République des Corsaires des Bahamas, qui a notamment inspiré le jeu Assassins Creed : Black Flag.
#4 : La piraterie n'était pas seulement une affaire d'hommes
On associe souvent sexisme et piraterie. Bien qu'il serait inexact de dire que la discrimination de genre (bel et bien présente à l'époque des corsaires) ne concernait pas les pirates, il a bel et bien existé des femmes pirates respectées. Cependant, cela ne s'est pas fait sans accrocs. Beaucoup d'entre elles ont d'abord dû se travestir afin de pouvoir approcher l'équipage et espérer l'intégrer.
Malgré tout, des femmes telles que Mary Read ou Anne Bony ont pu continuer d'exercer et ce même après que leur déguisement d'homme ait été percé à jour. Il ne s'agit pas pour autant d'une généralité et les exemples en la matière sont assez rares du XVI au XVIIIe siècle, contrairement à la piraterie Viking et chinoise, où la présence de femmes était beaucoup plus communément admise.
#5 : Le code d'honneur des pirates avait un rôle crucial dans le système démocratique
Le code d'honneur des pirates est, là aussi, un cliché répandu. Et pour une fois, ce code est bel bien véridique. Cependant, il changeait au gré des équipages.
Globalement, ce code mettait à l'honneur le système démocratique de la piraterie. Il prône la nécessité d'instaurer des décisions de groupe, de partager les richesses et même d'éviter toute querelle (si ce n'est dans un duel organisé en bonne et due forme).
La vengeance constituait également une partie importante du code des pirates, chacun ayant le droit d'user de la violence pour se faire justice, faire cesser un comportement jugé despotique ou contraire au code d'honneur. Dans ce même ordre d'idées, le code d'honneur des pirates rédigé par le capitaine Bartholomew Roberts, prévoyait d'abandonner les voleurs sur une île déserte, en guise de châtiment. Le même sort était réservé aux déserteurs, si la mort ne les attendait pas au tournant.
#6 : Pas de discrimination envers les personnes non-valides
Pour une fois, voilà un cliché qui rentre en accord avec la réalité. Le cache-œil, les crochets et les jambes de bois sont l'apanage du pirate. N'est-ce pas la preuve ultime que les pirates encouragent totalement le travail des handicapés et des personnes à mobilité réduite ? Loin d'être traités comme des parias, subir des blessures de guerre était perçu comme héroïque. Les amputations n'étaient donc pas du tout synonyme de rétrogradation sur le navire. De plus, ils n'étaient pas livrés à eux-mêmes puisque la codépendance était évidente au sein du groupe.
Cela va même bien au-delà de ça puisque les pirates ont instauré un code du travail avant l'heure et une variante des systèmes d'assurance. Les pirates avaient des régimes d'indemnisation des accidents de travail pour leurs membres. Ils bénéficiaient de paiements qui variaient en fonction de la gravité de la blessure. L'indemnisation était donc plus importante en fonction des membres perdus. Un pied valait, par exemple, plus que quelques doigts.
#7 : L'homosexualité était tolérée
Certains codes de piraterie interdisait totalement aux pirates d'être accompagnés d'une promise sur le bateau, sous peine d'être tué sur le champ. Pourtant, cela ne veut pas dire que cette loi était généralisée à tous les navires et l'amour pouvait bel et bien éclore sur un bateau, qu'il s'agisse d'une union hétérosexuelle ou bien homosexuelle.
Alors que la marine britannique réprimait l'homosexualité dans le sang, la piraterie l'acceptait parfaitement. Loin d'être condamnée, celle-ci était même formalisée par le biais d'une union civile homosexuelle, le matelotage, qui était d'usage entre le XVIIe et XVIIIe siècle.
Cela impliquait que les deux parts se promettent solennellement de se protéger l'un et l'autre en combat, qu'ils consentent à partager leurs revenus et qu'ils hériteraient des biens de chacun en cas de décès de l'un d'eux. Les pirates John Swann et Robert Culliford se tournèrent notamment vers cette forme d'union afin d'officialiser leur union romantique.
#8 : La piraterie pouvait vous tomber dessus du jour au lendemain
Loin d'être un repaire à criminels, de nombreux pirates se sont tournés vers ce domaine pour des raisons diverses et variées. Il ne s'agissait pas uniquement de marins habitués à la contrebande et le métier était ouvert aux horizons divers. Comme nous l'avons vu plus haut, les équipages pouvaient être constitués d'esclaves ou encore de volontaires lambdas séduits par la vie en mer. De plus, les pirates n'étaient pas touchés par les inconvénients qui incombaient aux équipages de vaisseaux de guerre ou de marchands.
Ces derniers pouvaient d'ailleurs être recrutés en cas de sabordage ou de pillages de navires transportant des marchandises. Plutôt que d'être tués sur le champ, certains marins se voyaient proposer un poste de pirate en échange de leur vie. Mais les effectifs n'étaient pas seulement grossis par le biais de la contrainte.
Ainsi, vers 1713, les pirates connurent une importante vague de volontaires lorsque le traité d'Utrecht fut voté. Celui-ci empêchait, en effet, les corsaires de garder ce qu'ils avaient volé dans les navires sabordés. Frustrés, beaucoup d'entre eux se tournèrent donc vers la piraterie dans l'espoir de retrouver les privilèges de vol légal que la couronne Anglaise leur avait accordé en 1708. Il est donc amusant de voir que les anciens ennemis jurés des pirates aient retourné leur veste si facilement... et que les pirates les aient accepté en retour.
#BONUS : Le Rhum était un véritable code social au sein de la piraterie
Nous avons vu que les pirates pouvaient se montrer ouverts d'esprit de bien des façons. Mais s'il y a bien quelque chose que ces derniers ne supportent pas, c'est que l'un de leur camarade ne boive pas un coup avec eux.
Il faut dire qu'imaginer un pirate accroché à sa bouteille de rhum est aussi commun que de se le figurer avec une jambe en bois. Là aussi, ce trait de l'imaginaire collectif est justifié puisque l'alcool coulait bel et bien à flots sur les navires. Mais plus que n'importe quel breuvage, qu'il s'agisse de whisky ou de bière, l'alcool phare des pirates était le rhum. Il était d'ailleurs répandu à de nombreux marins qu'il soient corsaires ou marchands.
La raison de cette suprématie est simple : il s'agissait d'une boisson répandue au sein des cargaisons marines, puisque sa production était assurée dans les Caraïbes. Ainsi, lorsqu'un bateau pirate abordait un navire marchand naviguant depuis la Mer des Sargasses ou la Mer des Antilles, il y avait de fortes chances pour que ce vaisseau contienne du rhum.
Le rhum était, en premier lieu, une denrée extrêmement importante pour le bien-être des pirates. Cette boisson était, en effet, utilisée à des fins médicales. Ainsi, elle était indiqué tantôt pour soigner les maladies entraînées par des avaries, tantôt pour soigner des coups de froid, voire le scorbut.
Evidemment, l'alcool avait également un aspect festif et la pression sociale liée à l'enivrement était particulièrement pressante. Ainsi, les pirates qui avaient le malheur de ne pas se laisser tenter par le goulot étaient très mal perçus, voire carrément considérés comme des êtres asociaux. La tolérance a ses limites, quand même !
Par Damn, il y a 3 ans :
Maintenant je veux être un pirate pour le rhuuum
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