Le studio Ghibli fête ses 40 ans, va-t-il survivre au départ de Miyazaki ?
En 1985, le studio Ghibli voyait le jour. Au fil du temps, la maison du réalisateur Hayao Miyazaki a livré aux yeux d'un public émerveillé des oeuvres toutes plus émouvantes, poétiques et fascinantes les unes que les autres. Alors que le studio d'animation japonais fête ses quarante ans, on fait le point sur son avenir.
Le studio Ghibli, un exemple unique au monde
En juin 1985, Hayao Miyazaki et Isao Takahata fondent Ghibli. Quatre décennies plus tard, le studio d'animation japonais est devenu un incontournable non seulement chez les cinéphiles, mais aussi auprès du grand public. L'univers onirique et souvent sombre de leurs longs-métrages, servi par des dessins peints à la main, résonne chez les spectateurs du monde entier. En 40 ans, les studios ont signé 25 films, de Nausicaä de la Vallée du Vent en 1984, produit au sein du studio Topcraft juste avant que Ghibli ne devienne une entité à part entière (les équipes existaient déjà à ce moment-là), jusqu'au Garçon et le Héron en 2023, un succès au box-office. Cette production à part dans le paysage audiovisuel mondial témoigne d'une volonté de repousser les limites de l'animation et d'offrir aux spectateurs une vision éloignée des standards de thèmes et d'esthétique des classiques du genre. Écologie, guerre, perte, deuil, maladie, déforestation, passage à l'âge adulte... La vision du monde proposée par Ghibli se veut plus mature que celle des studios d'animation traditionnels. Un regard sans concession, mais non sans beauté formelle, qui a permis au studio d'être reconnu à travers le monde, et récompensé par de nombreux prix.
Un studio porté par le génie créatif d'Hayao Miyazaki
Désormais âge de 84 ans, Hayao Miyazaki a déjà annoncé à plusieurs reprises qu'il partait à la retraite, sans jamais mettre sa "menace" à exécution. Le réalisateur a toujours une bonne raison de revenir travailler sur un nouveau projet, comme le prouve la sortie en salles de son dernier film, Le Garçon et le Héron, sorti en 2023, dix ans après Le Vent se lève, présenté comme son ultime chef d'oeuvre. De la fin des années 70 aux années 2020, le cinéaste a signé douze longs-métrages, dont dix sont officiellement produits par le studio Ghibli. Le Château de Cagliostro, Nausicaä de la Vallée du Vent, Le Château dans le ciel, Mon voisin Totoro, Kiki la petite sorcière, Porco Rosso, Princesse Mononoké, Le Voyage de Chihiro, Le Château ambulant, Ponyo sur la falaise, Le vent se lève et Le Garçon et le Héron représentent la moitié de la filmographie des studios. Hayao Miyazaki n'est pas le seul talent du studio (Isao Takahata et Hiromasa Yonebayashi ont signé des films d'animation acclamés) mais il en demeure la tête d'affiche. Lui et Ghibli sont intimement associés dans l'esprit du public, et le studio risque d'avoir bien du mal à survivre à son départ.
Et dans le futur de Ghibli ?
Après le décès d'Hayao Miyazaki (qu'on espère le plus tardif possible, mais comme le dit Jaqen H'ghar dans Le Trône de Fer, "Valar Morghulis") le studio Ghibli va avoir la lourde tâche d'inventer l'avenir sans son fer de lance. Se renouveler, tout en embrassant l'héritage du grand maître ne sera pas si simple. L'iconographie des longs-métrages d'animation du studio est très particulière, est reconnaissable entre toutes. Elle est si ancrée dans l'imaginaire populaire que divers outils d'intelligence artificielle proposent de transformer des photos ou des images façon Ghibli, comme ici avec Titanic. Le problème, c'est que ces détournements, qui posent à la fois des problèmes d'authenticité et de droits, dépouillent le style d'Hayao Miyazaki de son essence -émotion, philosophie, profondeur. Le réalisateur est d'ailleurs fermement opposé à l'IA. L'animation visionnaire du réalisateur en est réduite à un produit commercial, rapidement consommé et jeté à la poubelle. Dans les années à venir, Ghibli va être challengé par le devoir de recruter et former une nouvelle génération d'auteurs capables de développer leur propre style et d'entraîner le studio dans une direction inédite. Un challenge dont on a hâte de voir les résultats !